L'avocat de familles de victimes de l'assaut du Bataclan le 13 novembre dernier à Paris a déposé un recours pour savoir pourquoi huit soldats de l'opération Sentinelle présents sur les lieux ce soir-là n'étaient pas intervenus. Me Gérard Chemla a expliqué qu'il avait fait le mois dernier une demande d'acte devant le juge d'instruction, mais que le magistrat avait rejeté sa requête. "J'ai donc fait appel devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris", a-t-il dit.
Trois heures pour intervenir. Les familles veulent comprendre la "désorganisation générale" qui a fait que les forces de l'ordre - à l'exception d'une petite équipe de la Brigade anticriminalité (BAC) - ont mis trois heures pour intervenir, selon l'avocat. "Les soldats n'ont pas eu l'autorisation d'intervenir alors que des personnes agonisaient. Pourquoi des gens en armes ne sont pas intervenus ?", se demande Me Chemla. Un représentant des commissaires de police avait révélé en mars dernier devant la commission d'enquête parlementaire sur les attentats que des militaires de Sentinelle, présents près du Bataclan, avaient refusé d'intervenir comme le leur demandait un policier arrivé sur les lieux.
Les soldats ont expliqué qu'ils n'avaient pas reçu l'ordre d'intervenir et l'un d'eux a même refusé de prêter son fusil d'assaut au policier, avait témoigné Jean-Luc Taltavull, secrétaire général adjoint du syndicat des commissaires. "Le détachement Sentinelle a dit : 'Non, j'ai pas d'ordres pour bouger'. Alors il a dit : 'Alors passe-moi ton Famas (fusil d'assaut, ndlr)'. L'autre évidemment, son arme il n'allait pas la lâcher", avait-il raconté. Postés devant la sortie de secours du Bataclan, où un commissaire de police avait réussi à tuer l'un des assaillants, les policiers de la BAC avaient essuyé des rafales de Kalachnikov.
Pas d'ordre reçu. Pour Jean-Luc Taltavull, cette épisode démontrait qu'il fallait mieux définir les rôles en cas d'attaque terroriste. Le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian avait justifié en juin dernier devant la même commission d'enquête la passivité des militaires par le fait qu'ils n'avaient pas reçu d'ordre en ce sens du préfet de police. "Le prêt d'une arme est contraire à toutes les règles d'engagement. En outre (ces militaires) ne sont pas formés aux interventions en présence d'otages", avait-il ajouté.