Comment la société pourra-t-elle rebondir après la crise du coronavirus ? Christian Clot, explorateur-chercheur, directeur de l’Institut de l’adaptation humaine et auteur de Covid, et après ? (éditions Michel Lafon), prône l'optimisme. Après s'être isolé dans plusieurs régions extrêmes du monde, il appelle les Français à ne pas sous-estimer leurs capacités. "Nous avons des ressources extraordinaires et il faut aller les chercher", estime Chistian Clot au micro d'Europe 1.
"On a peut-être oublié de dire aux Français que OK, on vit une période très difficile, mais qu'il est possible de se projeter et d'avoir envie du futur. Et on le voit aujourd'hui, les gens n'ont plus envie du futur".
Des expériences extrêmes
En 2016 et en 2017, Christian Clot a lancé une mission dont le nom de code est "Adaptation", durant lequel il est parti, pendant 120 jours, à la découverte de milieux climatiques extrêmes. Il est allé dans le désert du Dasht-e Lut, en Iran, puis vers les canaux marins de Patagonie, avant de se plonger dans la forêt amazonienne du Brésil. Il a terminé en traversant les monts de Verkhoïansk, en Russie orientale.
Durant son aventure, il a connu des températures allant de -60 à 60 degrés, avec pour objectif de comprendre comment le cerveau réagit dans ce type de crises. "L'idée, c'était vraiment de voir dans les milieux les plus extrêmes, au moment le plus extrême", explique Chistian Clot. Le tout sans assistance ni même moyen de communication.
"Dans ces situations, on ne peut pas se dire 'ah ben tiens, ça ne va pas, j'appelle les copains, on vient me chercher'. Parce que ça, c'est trop facile. Quand on est dans une crise, on ne peut pas appuyer sur un bouton pour que ça s'arrête. Il faut que l'on accepte de dépasser par nos capacités", justifie-t-il. Une expérience qu'il met en parallèle avec la crise du coronavirus.
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Les différentes étapes de cette étude sur le comportement humain, qu'il définit comme très sérieuse, ont été entrecoupées de retours en France. "Il fallait que l'on puisse paramétrer mon cerveau puisque c'est cela qu'on essayait d'étudier. Donc, faire des IRM* avant et après, pour que l'on puisse voir la différence. Cette différence observée est motivée par, entre autres, la capacité d'émerveillement, qui induit que l'on va s'accrocher à un élément positif et arrêter de vouloir revenir en arrière. Et ça, c'est ce qu'on doit faire aujourd'hui. Retrouver cette envie du futur".
"Changer de paradigme"
Un tel mode de pensée implique une forme de lâcher-prise : il faut renoncer à modifier ce sur quoi nous n'avons pas d'influence. "Il faut se dire : 'OK. Je ne peux pas avoir de maîtrise sur la vide. Je ne peux pas avoir de maîtrise sur la situation, mais j'ai de la maîtrise sur mes décisions'."
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Christian Clot recommande de rechercher une "Ephiphanie". "C'est ce moment où, tout d'un coup, on a une chose qui nous fait plaisir. Ça peut être minime, un détail, mais on peut le métaboliser pour se dire : 'je vais aller chercher ça tous les jours et encore et encore'. Aujourd'hui, on sait former des gens pour transformer leur cerveau et changer leurs paradigmes", indique Christian Clot, avant de conclure : "Nous devons transformer nos mondes et nos sociétés pour construire un futur. Et ça, c'est l'adaptation."
* avec l'équipe du professeur Etienne Koechlin, directeur du laboratoire de sciences cognitives de l’Ecole normale supérieure de la rue d’Ulm