Alors que 11 cas de coronavirus ont été recensés en France, les scientifiques travaillent dur pour mieux connaître ce nouveau virus venu de Chine, et le contenir au mieux. C'est le cas de Vincent Enouf, directeur adjoint du Centre national de référence des virus respiratoires à l'Institut Pasteur. Il était lundi l'invité de Nathalie Levy dans le Grand journal du soir. Au micro d'Europe 1, il détaille les méthodes de travail et de sécurité des équipes scientifiques françaises.
Vincent Enouf nous ouvre les portes d'un endroit très secret et impénétrable de l'Institut Pasteur : la cellule qui détecte et observe le coronavirus. Une équipe d'une dizaine de scientifiques, mise en place rapidement. "Le nombre de personnes qui travaillent sur le coronavirus a beaucoup augmenté.Dans les premiers temps, sur la période de la mise en place d'un système de détection on était une dizaine", explique Vincent Enouf. "On a demandé du renfort dès qu'on a détecté des cas et isolé le virus. Des thématiques de recherches et une 'task force' se sont mises en place à l'Institut, pour travailler dans différents domaines pour pouvoir avancer le plus rapidement possible", poursuit-il.
Des conditions de sécurité renforcées
Le scientifique explique au micro d'Europe 1 les précautions prises pour assurer la sécurité du personnel. "Les échantillons nous parviennent dans des tubes, dans des petits cartons. Il y a un triple emballage avec un système de protection. Ce sont des transporteurs agréés qui apportent ces prélèvements", détaille Vincent Enouf. La cellule de l'institut Pasteur reçoit environ une dizaine d'échantillons par jour. Quatre ou cinq heures de travail sont nécessaires pour affirmer si l'échantillon est porteur du virus ou non.
Malgré le danger que représente ce virus, les scientifiques de la cellule ont l'habitude de travailler dans ces conditions, même si le niveau de sécurité est plus élevé qu'en temps normal. "On a une pièce ou l'air entre mais ne ressort qu'une fois filtré, et il y a des postes de sécurité microbiologique permettant de protéger les prélèvements et les chercheurs. On travaille avec des doubles gants, des combinaisons intégrales et des lunettes", complète Vincent Enouf.
"On est une équipe de professionnels, on est habitué à travailler dans ces conditions", nuance-t-il. "Tout au long de l'année, on a des suspicions d'autres virus comme le H5N1, et donc à chaque fois on travaille dans les mêmes conditions. Le personnel est très habitué, hyper qualifié et en plus à l'institut Pasteur on a des conditions optimales pour travailler en toute sécurité", assure-t-il.
"On se pose un tas de questions"
Malgré la qualification de ces équipes, le travail est dense. "Cela fait trois semaines qu'on est sur le point quasiment tous les jours", reconnait le chercheur. "On fait attention à ce que le personne puisse se reposer un peu pour être toujours en capacité de travailler".
Pour ces scientifiques, il s'agit d'abord de mieux connaître le virus. "On se pose un tas de questions", explique Vincent Enouf. "On examine un grand nombre de prélèvements : le sang, les selles, les urines. Selon les résultats, il faut mettre en place des mesures barrières adaptées pour éviter sa diffusion", poursuit-il. Pour l'instant, la première voie de diffusion est "aéroportée" : si quelqu'un de contaminé tousse à côté de nous, et que l'on inhale les particules virales. "Aujourd'hui, on se demande s'il y a d'autres moyens de transmissions", affirme le chercheur.
Aucun traitement à ce jour
Les interrogations sont nombreuses concernant ce nouveau virus : est-ce qu'une personne guérie est encore contagieuse ? Est-ce que le virus est toujours détectable ? "Toutes ces questions restent posées", assure Vincent Enouf. "Le fait d'avoir six personnes hospitalisées en France nous permet d'avancer sur la connaissance du virus", précise le scientifique. Aucun traitement efficace n'a été découvert à ce jour. Selon Vincent Enouf, des essais sont en cours pour vérifier si des molécules déjà connues pourraient agir sur la maladie.
Enfin, le spécialiste considère que l'on réagit en France de manière mesurée et adaptée à la menace du coronavirus. "La réflexion se fait au fur et à mesure, en fonction des informations que l'on possède", explique le chercheur. "On peut dire qu'on pratique de manière mesurée les méthodes barrières qui peuvent être utilisées contre ce virus", conclut-il. A l'échelle mondiale, le dernier bilan fait état de 908 morts et plus de 40.000 personnes contaminées.