La justice à l'heure du Covid-19. Jeudi, le ministère de la Justice a publié une ordonnance qui permettra aux procès d'assises de se dérouler en visioconférence, pour un accusé détenu qui ne serait pas en état de comparaître. Et ce, sans solliciter l'accord des intéressés, et seulement au stade des plaidoiries. Une solution sur mesure pour "sauver" le procès des attentats de janvier 2015, interrompu plusieurs semaines. L'ordonnance, sitôt publiée, a été appliquée : le procès doit reprendre lundi.
L'un des principaux accusés, toujours positif au nouveau coronavirus, suivra les audiences depuis sa prison. Il assistera aux plaidoiries des parties civiles, aux réquisitoires et aux plaidoiries de la défense, dont la sienne, en détention, jusqu'au verdict si besoin.
Une "déshumanisation"
Le président de la cour d'assises spéciale a informé les avocats jeudi soir, écœurés à l'instar de Me Safya Akorri, qui défend l'un des accusés. "Je ne souhaite à personne, même pas à mon pire ennemi de se retrouver à être jugé depuis un lieu de détention avec une caméra, en visio", dénonce-t-elle. "On entend extrêmement mal, cela coupe régulièrement. Découvrir le verdict à distance ce n'est pas normal, on ne devrait pas accepter ça."
"Je ne comprends pas que la justice n'ait pas conscience de la déshumanisation que cela implique", ajoute l'avocate. La Chancellerie fait valoir que cette disposition ne sera valable que jusqu'à la mi-mars, soit un mois après la fin de l'état d'urgence sanitaire. Déjà, certains s'inquiètent de voir ce régime d'exception perdurer dans d'autres circonstances.