"Il y a eu une faille au niveau du ministère de l'Intérieur." Feux de circulations cassés, poubelles vélos et trottinettes incendiés, vitrines brisées… Ce mercredi matin le parvis du tribunal du 17ème arrondissement de Paris se réveille avec les séquelles des violences qui se sont produites la veille pendant une manifestation de soutien à la famille Traoré et contre les violences policières, dans un contexte d'indignation après la mort de George Floyd. Une situation inacceptable pour Geoffroy Boulard, maire de cet arrondissement de la capitale, qui dénonce au micro d'Europe 1 "un problème dans la chaîne de commandement" des forces de l'ordre. Invité lui aussi d'Europe 1, le secrétaire général unité police SGP-FO, Yves Lefebvre, estime lui que rien de plus ne pouvait être fait.
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Appelant à ce que la justice "engage des responsabilités pénales vis-à-vis des organisateurs de cette manifestation interdite" à double titre, de la part des autorités et en vertu des mesures sanitaires limitant à 10 personnes les rassemblements, le maire Geoffroy Boulard pointe un "manquement du préfet de police de Paris et du ministère de l'Intérieur". Concrètement, l'interdiction de ce rassemblement est intervenue le matin même pour le soir, et le dispositif mis en place n'était pas adapté à la situation, selon l'édile.
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De plus, les forces de l'ordre "étaient concentrées sur la défense du tribunal avec des gendarmes mobiles très présents autour, mais totalement absents ailleurs. Et cet ailleurs, ce sont des habitations... Le choix a donc été fait au moment de la dispersion de cette manifestation de sacrifier les quartiers avoisinant", dénonce le maire de quartier.
"Monsieur Boulard, restez faire de la politique !"
"Monsieur Boulard, restez faire de la politique !", lui a rétorqué Yves Lefebvre, le secrétaire général unité police SGP-FO. "Que voulez-vous que nous puissions faire de plus ? Vous appartenez à un parti politique [Les Républicains, ex-UMP, ndlr] qui a supprimé des milliers d'emplois dans la police. Et aujourd'hui nous sommes exsangue !" lâche-t-il.
Un argument que n'entend pas le maire : "Ça fait des années que j’entends ça. Je vais rencontrer le préfet jeudi et lui demander les consignes qu'il a donné et pourquoi la double interdiction n'a pas été respectée."
"On ne pouvait rien faire d'autre"
"Si hier soir [mardi, ndlr] le préfet ou le ministre de l'Intérieur avait décidé de procéder à des interpellations en amont, on provoquait un niveau supérieur de violence", lui répond le policier reprenant par la même son calme. "Effectivement ce rassemblement de 20.000 personnes n'avait pas lieu d'être, mais dès lors que des élus, en l'occurrence deux députés LREM, ont appelé à cette manifestation interdite par le préfet et par le contexte sanitaire, on ne peut rien faire d'autre."
Indiquant avoir consulté des "experts en gestion du maintien de l'ordre", Yves Lefebvre affirme qu'une autre tactique aurait mené à des "confrontations physiques". Une situation qu'il aurait été d'autant plus délicate à gérer "qu'il y avait de tout dans cette manifestation", des collégiens aux Black Blocs.
Malgré les nombreux dégâts matériels, le secrétaire général préfère donc retenir "le seul point positif de cet événement : le nombre de blessés somme toute limité" [une vingtaine de blessés parmi les CRS, ndlr]. "Si on avait eu plus, on irait encore plus vite vers un embrasement des banlieues." Un scénario que le policier dit craindre dans les heures et les jours à venir.