Alloue, un village en Charente. Il y a trente ans, ici, vous aviez 75 fermes. En 2018, il en reste 23. Alors la colère des agriculteurs qui s'exprime cette semaine, on la comprend bien à Alloue. Et pour ne pas voir mourir leur village, une dizaine d'entre eux de la commune a créé une coopérative, pour aider les jeunes à venir s'installer. Ils leur apprennent les ficelles du métier, gèrent la comptabilité. Une sorte de ferme à l'essai.
"C'est vraiment super." C'est comme ça que Jenny, 36 ans, a décidé de se lancer dans l'élevage de canard bio. "L'investissement dont moi j'ai besoin, mes couveuses, mes éleveuses, ils le font pour moi. Quand, vraiment, l'activité sera viable et que je déciderai de passer le pas et de m'installer véritablement en tant qu'agriculteur, je reprendrai le prêt. En attendant, c'est mis à ma disposition. Ne pas avoir cette épée de remboursement au-dessus de la tête dès le premier mois, je trouve que c'est vraiment super", confie-t-elle à Europe 1. Sans une telle structure, Jenny estime qu'elle "galérerait beaucoup plus" à se lancer.
Pour assumer les frais, il y a des aides publiques, de la région notamment. Les retraités prêtent également des terres ou du matériel et donnent aussi beaucoup de leur temps. Pour eux, c'est essentiel de voir cette jeunesse se former, s'installer car c'est toute la vie du village qui en dépend, ses commerces, son bureau de poste, son école.
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"Des gens s'organisent pour vous donner votre chance." C'est d'ailleurs ce qui a motivé Christian Luduque, ancien éleveur laitier : "Au rythme du développement tel qu'on le voyait venir, d'ici dix ans il serait resté cinq agriculteurs sur la commune. C'est le début du désert." Il tient donc à s'adresser directement aux jeunes qui pourraient être tentés par l'aventure. "Ici ou ailleurs, il y a des gens qui vous accueilleront et qui s'organisent maintenant pour vous donner votre chance de mener un projet sérieux", lâche-t-il.
Selon lui, il est intéressant de se lancer dans une telle démarche, car "aujourd'hui, il y a une demande nouvelle des consommateurs" : "On manque de produits bio, on manque de volailles fermières, on manque de tous ces produits locaux qui pourraient être produits sur place si on a la capacité à former les jeunes qui vont les produire." Un groupe d’habitants réfléchit maintenant à transformer l'ancienne boulangerie d'Alloue en épicerie circuit court, pour vendre en direct les produits des agriculteurs de la commune.