Après la décision de la Cour suprême des États-Unis vendredi dernier, les députés de la Nupes et ceux du groupe Renaissance ont déposé une proposition de loi pour inscrire le droit à l'avortement dans la Constitution. Le but : consacrer symboliquement et protéger ce droit en cas de changement d'équilibres politiques. En France, environ une femme sur trois a recours à une interruption volontaire de grossesse (IVG) dans sa vie.
"La fécondité n'est pas quelque chose qui se maîtrise à 100%"
"Le nombre d'IVG en France et remarquablement stable, il a un petit peu diminué ces dernières années, mais on est toujours au-dessus de 200.000 IVG par an, ce qui, dans un pays où la contraception est quand même relativement facile d'accès et gratuite dans certains cas, veut bien dire que la fécondité n'est pas quelque chose qui se maîtrise à 100%", explique Ghada Hatem, gynécologue obstétricienne, fondatrice de la Maison des femmes de Saint-Denis.
Une grossesse sur quatre est interrompue volontairement et cela concerne en majorité des femmes âgées de 20 à 29 ans, indique Magali Mazuy, chercheuse à l’Institut National d’études démographiques, en charge des statistiques sur l’avortement. "Ces jeunes femmes entrent en sexualité plus tôt, avec davantage de ruptures, davantage de remises en couple, des aventures hors du couple, potentiellement sans contraception. C’est cette diversification grandissante du parcours de vie des femmes qui implique qu’elles sont plus souvent soumises au risque de grossesse imprévues, qu’elles soient sous contraception ou pas", souligne-t-elle.
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Le rejet de la pilule et des traitements hormonaux au profit d’une contraception plus naturelle augmente aussi le risque de grossesse non désirée.
L'avortement reste un choix souvent douloureux aux raisons multiples : accident de contraception, précarité financière, problème de santé... "Les femmes ont et auront probablement toujours besoin d'avorter un jour ou l'autre, mais ça touche toutes les catégories sociales, tous les âges, tous les métiers", certifie Ghada Hatem.
"La seule spécificité qu'on pourrait observer, ce serait les femmes qui arrivent en limite de délai ou délai un peu dépassé. Ce sont en général des femmes qui ont eu des parcours de violence, des parcours de précarité qui ont eu du mal à se décider tôt. Mais toutes les autres, la plupart des femmes, dans 95% des cas, se décident très tôt, quel que soit leur profil", détaille la gynécologue obstétricienne.
L'IVG médicamenteuse représente 72% des cas
Les trois territoires où l’on enregistre le plus d’avortements sont l’Île-de-France où les professionnels de santé spécialisés sont plus nombreux et accueillent un quart des interventions, devant la région Rhône-Alpes et le Sud-Est. Un recours à l’IVG qui est multiplié par 40 dans les catégories sociales défavorisées.
L’IVG médicamenteuse qui consiste à prendre deux comprimés différents pour déclencher l’accouchement, le plus souvent dans les toutes premières semaines de grossesse, représente 72% des cas. L’avortement chirurgical par aspiration, qui peut se pratiquer jusqu’à 14 semaines de grossesse, est quant à lui en diminution constante.
Grâce à des campagnes de prévention et un accès facilité à la pilule abortive du lendemain, les jeunes filles encore mineures ont de moins en moins recours à l’IVG.