EN DIRECT - Nouvelle-Calédonie : une «circulaire pénale» va être publiée pour garantir «les sanctions les plus lourdes contre les émeutiers»

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avec AFP / Crédits photo : Delphine Mayeur / AFP , modifié à
Après trois jours d'émeutes, un autre gendarme a perdu la vie des suites "d'un tir accidentel", a annoncé Gérald Darmanin. Le déploiement de l'armée en Nouvelle-Calédonie a été officiellement annoncé par Gabriel Attal. Le Premier ministre a également confirmé le "déploiement d'un millier d'effectifs de sécurité intérieure supplémentaire", ainsi que la publication d'une circulaire pénale contre les émeutiers pour garantir "les sanctions les plus lourdes".

Trois jours après le début des émeutes en Nouvelle-Calédonie, dans lesquelles cinq personnes sont décédées, dont deux gendarmes, un millier de forces de sécurité intérieure supplémentaires sont en train d'être déployées en Nouvelle-Calédonie, où la situation "reste très tendue", a affirmé Gabriel Attal jeudi à l'issue de la réunion d'un nouveau conseil de défense à l'Élysée.

"À la demande du président de la République, nous allons renforcer encore le pont aérien de rétablissement de l'ordre qui a été mis en place, pour déployer un millier d'effectifs de sécurité intérieure supplémentaires, en plus des 1.700 effectifs qui sont déjà sur place", a détaillé le Premier ministre. La situation sur l'archipel "reste très tendue, avec des pillages, des émeutes, des incendies, des agressions qui sont évidemment insupportables et inqualifiables", a-t-il ajouté. Il a aussi indiqué qu'"une circulaire pénale" serait publiée par le garde des Sceaux dans les prochaines heures pour garantir "les sanctions les plus lourdes contre les émeutiers et les pillards".

Les informations à retenir :

  • Une "circulaire pénale" va être publiée pour garantir "les sanctions les plus lourdes contre les émeutiers", a annoncé Gabriel Attal
  • Un deuxième gendarme est mort ce jeudi matin à la suite "d'un tir accidentel"
  • Cinq personnes sont mortes depuis le début des émeutes, dont deux gendarmes
  • L'état d'urgence a été déclaré en Nouvelle-Calédonie
  • La France déploie l'armée pour sécuriser ports et aéroport de l'île, interdiction de TikTok
  • Dix leaders du CCAT, un groupe indépendantiste, sont assignés à résidence
  • L'Assemblée nationale a adopté dans la nuit de mardi à mercredi par 351 voix contre 153 le texte qui élargit le corps électoral
  • 1.800 policiers et gendarmes sont présents sur l'île, 500 renforts dans les prochaines heures

Un deuxième gendarme est décédé

Un gendarme a été tué jeudi matin en Nouvelle-Calédonie à la suite d'un "tir accidentel", a annoncé le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin, dans un message à l'AFP. "Il ne s'agit pas d'un tir ennemi", a-t-on précisé de source proche du dossier. Dans son message, le ministre, qui fait part de sa "grande tristesse", explique que selon les "premiers éléments, le décès serait consécutif aux blessures générées par un tir accidentel, alors que les gendarmes s'engageaient pour assurer une mission de sécurisation".

Gérald Darmanin a ajouté apporter "tout son soutien à la famille, aux proches et aux camarades" du gendarme tué.

Gérald Darmanin accuse l'Azerbaïdjan d'ingérence

Le Premier ministre Gabriel Attal a annoncé le déploiement de l'armée en Nouvelle-Calédonie, où trois nuits d'émeutes ont fait cinq morts, dont deux gendarmes, dans l'archipel secoué par la fronde des indépendantistes contre une réforme électorale votée par le Parlement. Le déploiement militaire doit permettre de "sécuriser" les ports et l'aéroport, a indiqué mercredi Gabriel Attal, qui doit à nouveau présider une cellule de crise interministérielle jeudi matin. De son côté, le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer Gérald Darmanin a accusé jeudi l'Azerbaïdjan d'ingérence en Nouvelle-Calédonie.

Comme on lui demandait si ce pays, pro-russe, faisant de l'ingérence en Nouvelle-Calédonie, le ministre a répondu sur France 2 :"l'Azerbaïdjan, ce n'est pas un fantasme, c'est une réalité", en regrettant "qu'une partie des indépendantistes aient fait un deal" avec ce pays.  La polémique monte sur l'influence de l'Azerbaïdjan depuis la signature en avril d'un mémorandum de coopération entre le Congrès de Nouvelle-Calédonie et l'Assemblée nationale de l'Azerbaïdjan.

L'Azerbaïdjan, qui reproche à Paris son soutien à l'Arménie, avait déjà convié à Bakou en juillet 2023 les indépendantistes de Martinique, Guyane, de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française. De cette conférence était né le "Groupe d'initiative de Bakou" qui vise à soutenir "les mouvements de libération et anticolonialistes français".

Darmanin qualifie les indépendantistes du CCAT d'organisation "mafieuse"

Le haut-commissaire sur le territoire français du Pacifique, Louis Le Franc, a pour sa part "annoncé un couvre-feu et interdit TikTok", un réseau social utilisé par les émeutiers, a précisé Gabriel Attal. Après deux nuits d'embrasement meurtrier, celle de mercredi à jeudi "a été moins violente", a déclaré le haut-commissaire. Dans l'agglomération de Nouméa, les riverains ont commencé à organiser la protection de leurs quartiers et érigé des barricades de fortunes, faites de palettes de bois, de bidons et autres brouettes, sur lesquelles ils ont planté des drapeaux blancs.

Les forces de l'ordre ont procédé à "plus de 206 interpellations" en Nouvelle-Calédonie et "dix leaders mafieux du CCAT", un groupe indépendantiste, ont été assignés à résidence, a annoncé jeudi Gérald Darmanin.

Le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer a ajouté que "plus d'une vingtaine d'assignations supplémentaires" seraient prononcées jeudi à l'encontre de membres de la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT), la frange la plus radicale du Front de libération Kanak socialiste (FLNKS). Cette organisation "est mafieuse, violente, commet des pillages, des meurtres" et n'est "pas politique", a accusé Gérald Darmanin, interrogé sur France 2.

Le bâtiment du Sénat coutumier incendié

Le bâtiment du Sénat coutumier a été incendié, selon son service de communication, sans que l'on sache pour l'instant l'ampleur des dégâts. Symbole de cette flambée de violence, le quartier pauvre d'Auteuil, où des tirs nourris résonnaient encore au petit matin, se trouve réduit jeudi à l'état de désolation, a constaté un correspondant de l'AFP, avec son supermarché incendié, ses commerces et restaurants brûlés et pillés.

La population Kanak estime ne "pas être entendue"

"Nous venons ramasser ce qu'il y a dans les magasins pour manger. Après, nous n'aurons plus de magasin. On a besoin de lait pour les enfants. Je ne considère pas que ce soit du pillage", a jugé auprès de l'AFP une habitante d'Auteuil, qui a requis l'anonymat. La violence, "on est obligé de passer par là, de tout péter parce qu'on n'est pas entendus", a assumé un jeune homme vivant dans la commune de Houaïlou, qui a également refusé de donner son nom.

Emmanuel Macron a renoncé à un déplacement prévu jeudi sur le site de l'EPR à Flamanville (Manche) pour pouvoir présider une "réunion de suivi". Il a proposé aux élus calédoniens d'avoir "un échange par visioconférence" à son issue. L'état d'urgence, demandé par le chef de l'État, est en vigueur sur le Caillou depuis 20 heures heure de Paris (5 heures jeudi à Nouméa).

Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a dans ce cadre procédé à cinq premières assignations à résidence de membres de la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT), frange la plus radicale du Front de libération Kanak socialiste (FLNKS), accusés d'être des commanditaires présumés des violences. Dans un communiqué, les leaders de ce mouvement, sans réagir à ces assignations, ont argué que "les exactions commises (...) n'étaient pas nécessaires", mais étaient "l'expression des invisibles de la société qui subissent les inégalités de plein fouet et sont marginalisés au quotidien".

Les principaux partis politiques du territoire et les autorités avaient appelé au calme mercredi, face à cette vague de violence, la plus grave depuis les années 1980. Ces violences ont fait trois morts, deux hommes de 20 et 36 ans, ainsi qu'une adolescente de 17 ans, ont détaillé les autorités jeudi. Un gendarme d'une vingtaine d'années touché à la tête par un tir a également succombé à ses blessures.

Pénuries alimentaires

En métropole, les députés ont adopté dans la nuit de mardi à mercredi le texte qui élargit le corps électoral. Cette réforme constitutionnelle devra encore obtenir les trois cinquièmes des voix des parlementaires qui doivent se réunir avant "fin juin" en Congrès à Versailles, selon Emmanuel Macron. À moins qu'indépendantistes et loyalistes ne se mettent d'accord d'ici là sur un texte plus global, a précisé le président de la République.

Le texte voté vise à élargir le corps électoral aux élections provinciales, cruciales dans l'archipel. Les partisans de l'indépendance jugent que ce dégel risque de réduire leur poids électoral et marginaliser "encore plus le peuple autochtone kanak". Mercredi, le président indépendantiste du gouvernement du territoire, Louis Mapou, a "pris acte" du vote mais déploré une "démarche qui impacte lourdement" sa "capacité à mener les affaires de la Nouvelle-Calédonie".

En Nouvelle-Calédonie, faute d'approvisionnement des commerces, les pénuries alimentaires ont provoqué de très longues files d'attente devant les magasins. Jeudi, les autorités ont annoncé un "pont aérien" entre l'hexagone et le territoire calédonien, où l'aéroport reste fermé jusqu'à nouvel ordre, notamment pour "assurer la prise en compte des besoins essentiels de la population". Le haut-commissaire Louis Le Franc a également évoqué la mise en place de convois sécurisés pour approvisionner les points de distribution alimentaire.

"Si la situation ne (revient) pas rapidement à la normale, les établissements vont être confrontés (...) à une pénurie de médicaments", a également alerté la fédération des établissements d'accueil des personnes âgées. D'importants effectifs de policiers et de gendarmes, dont des éléments de leurs deux groupes d'élite, le GIGN et le RAID, sont déjà mobilisés. D'autres renforts étaient en cours d'acheminement dans l'archipel, selon Gérald Darmanin. D'après le ministère, 1.800 policiers et gendarmes y étaient déployés mercredi et 500 de plus y arriveront dans les heures qui viennent.