Les agriculteurs laissent de nouveau éclater leur colère jeudi, allant pour certains jusqu'à menacer de bloquer Paris, pour sommer le gouvernement de répondre sans délai à leur détresse. Gabriel Attal, après avoir réuni les ministres de l'Agriculture, de la Transition écologique et de l'Economie, doit faire de premières annonces vendredi.
Le temps presse d'autant plus pour le gouvernement que les "syndicats risquent d'être débordés si l'attente est trop longue", ont alerté les services de renseignement dans une note consultée par l'AFP, soulignant que "les risques de troubles à l'ordre public sont réels". Suivez en direct l'évolution de la situation.
Les principales informations :
- 77 points de blocage organisés jeudi un peu partout en France, selon la FNSEA
- Gabriel Attal fera des annonces vendredi pour répondre à la colère des agriculteurs
- La CGT appelle ses militants à rejoindre la mobilisation
- Deux syndicats d'Ile-de-France appellent au "blocus de Paris", tandis que le président des Jeunes Agriculteurs estime que le blocage de la capitale "doit être un des derniers recours"
"Ce qui se passe avec les agriculteurs est un signal à l'UE", selon Bruno Le Maire
Le ministre de l'Économie Bruno Le Maire a estimé jeudi que "ce qui se passe aujourd'hui avec les agriculteurs (était) un signal d'alerte envoyé à la société française et à l'Union européenne", en faveur de "plus de liberté et moins de contrôles".
Évoquant la loi de simplification pour les entreprises, actuellement en préparation à Bercy, Bruno Le Maire a déclaré qu'il y avait "derrière ce projet de loi une raison humaine". "Et ce qui se passe aujourd'hui avec les agriculteurs devrait nous inspirer : c'est un signal d'alerte envoyé à la société française et à l'Union européenne toutes entières sur ce que nous voulons comme avenir commun (...) nos compatriotes aspirent à plus de liberté et à moins de contrôles", a-t-il dit, devant les instances de l'organisation patronale U2P.
Bloquer Paris "dernier recours" mais "tout est sur la table"
Le blocage de Paris "doit être un des derniers recours", mais "tout est sur la table", a déclaré jeudi le président de Jeunes Agriculteurs Arnaud Gaillot depuis un barrage dans l'Yonne. "La balle est dans la camp du gouvernement", à qui il revient "de faire qu'on évite une paralysie du pays", a-t-il ajouté, au lendemain de la présentation des doléances du monde agricole.
En parallèle, le président de la FNSEA Arnaud Rousseau a déclaré, depuis ce même barrage, que les doléances transmises au gouvernement par les syndicats agricoles représentent "un paquet sur lequel nous ne transigerons pas". Dans le même temps, deux syndicats agricoles, FDSEA et Jeunes Agriculteurs d'IDF, ont appelé au "blocus de Paris" vendredi.
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Les agriculteurs ont organisé 77 points de blocage jeudi un peu partout en France, selon un décompte du syndicat majoritaire FNSEA. Et les sections d'Ile-de-France de la FNSEA et des Jeunes agriculteurs (JA) ont appelé leurs adhérents à se rassembler vendredi "sur les grands axes autour de la capitale". Signe que la base est moteur dans cette mobilisation depuis une semaine, les organisations nationales ne se sont pour l'instant pas jointes à cet appel à bloquer l'Ile-de-France.
La CGT appelle ses militants à rejoindre les agriculteurs
La CGT appelle ses militants à "aller rencontrer" les agriculteurs mobilisés pour dénoncer notamment "leur faible rémunération" et "créer les conditions permettent de faire converger" leurs revendications salariales, dans un communiqué transmis jeudi. "La CGT appelle ses militantes et militants, partout où c'est possible, à créer les conditions permettant de faire converger les revendications des salarié·es, des travailleuses et des travailleurs agricoles et des agricultrices et des agriculteurs", écrit la centrale de Montreuil.
"Nos échanges doivent permettre d'élargir la mobilisation et de créer des convergences sur les moyens de bien vivre de son travail, de bien manger, tout en protégeant notre santé et celle de la planète", estime la CGT, qui dit avoir pris attache avec la Confédération paysanne et le Mouvement de défense des exploitants familiaux (Modef).
Gabriel Attal fera des annonces vendredi pour répondre à la colère des agriculteurs
Après un marathon de rencontres avec les syndicats agricoles, Gabriel Attal va diriger jeudi matin à 8h30 une réunion gouvernementale à Matignon avec les ministres de l'Agriculture Marc Fesneau, de la Transition écologique Christophe Béchu et de l’Économie Bruno le Maire. Il s’agit de discuter des derniers détails alors que, selon les informations d’Europe 1, Gabriel Attal dévoilera de premières mesures vendredi après-midi à l’occasion d’un déplacement auprès d’agriculteurs. >> En savoir plus
La Confédération paysanne appelle ses adhérents à se mobiliser
La Confédération paysanne, troisième syndicat agricole en France, classé à gauche, a appelé mercredi l'ensemble de ses adhérents "à se mobiliser" auprès des agriculteurs déjà sur le terrain, tout en soulignant être en désaccord avec les "solutions proposées" par les syndicats majoritaires. De son côté, la FNSEA a réclamé des aides "immédiates" et un allègement des contraintes environnementales.
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Dans l'Oise, l'Occitanie et la Loire, le mouvement se poursuit
A Rennes, une manifestation est organisée dans la matinée devant la préfecture de région par le syndicat Coordination rurale. Des pêcheurs pourraient aussi se joindre à la protestation. >> Notre article dédié à cette mobilisation
Dans l'Oise, environ 50 tracteurs n'excluent pas d'avancer vers Paris, en fonction des annonces du gouvernement - même si Arnaud Rousseau a écarté "à ce stade" un éventuel blocage de Paris.
Sur la N12, notre reporter a suivi une opération escargot au départ de Méré dans les Yvelines, en direction du triangle Rocquencourt, croisement des autoroutes A11 et A12. Pas quetion pour l'instant d'entrer dans la capitale. L'idée est surtout de montrer la mobilisation. Mais les Franciliens étaient nombreux ce matin à être ralentis pour rallier la capitale.
En Occitanie, point de départ de la protestation agricole la semaine passée, l'A64 (Toulouse-Bayonne) était toujours coupée mercredi soir à hauteur de Carbonne, à 40 km de la ville rose, pour la huitième journée consécutive.
Bison Futé a indiqué des interdictions de circulation sur l'A7 dans le sens nord/sud sur un tronçon à partir d'Avignon Nord, ainsi qu'une interruption de circulation sur l'autoroute A51 en direction de Marseille entre La Saulce et Sisteron-Nord. Plusieurs préfectures ont annoncé sur le réseau social X de nouveaux blocages et fermetures d'autoroutes à prévoir jeudi. La préfecture de la Loire a déclaré avoir pris un arrêté interdisant la circulation sur un tronçon de l'A72 dès 4h en prévision d'un blocage.
Dans le Gard, dès 6h, l'autoroute A9 entre Nîmes-Est et Gallargues et l'autoroute A54 entre Nîmes-Ouest et Nîmes-Garons seront fermées. En PACA, l'A54 sera fermée dès 8h30 sur la section Saint-Martin-de-Crau/Grans. Dans le Doubs, la préfecture a averti d'une opération escargot sur l'autoroute A36. Dans le Haut-Rhin, la préfecture a signalé un blocage à prévoir entre Niederhergheim et Niederentzen. Dans les Hauts-de-France, de très fortes perturbations sont également annoncées sur l'autoroute A1 à hauteur de Seclin.
Près de Béziers, des viticulteurs forcent des entrepôts de la grande distribution
Des viticulteurs ont incendié des palettes jeudi matin dans la cour d'un négociant de vin près de Béziers (Hérault) avant de forcer les portails de deux entrepôts de la grande distribution, a constaté un correspondant de l'AFP.
Le cortège réunissait environ 80 tracteurs ou remorques à Villeneuve-les-Béziers, brandissant des pancartes comme : "Vitis en colère", "Maintenant c'est du pain ou ça sera du plomb". Les manifestants ont d'abord pénétré dans l'enceinte du négociant Castel Vin, déversant du lisier dans sa cour puis mettant le feu à des palettes, selon l'AFP et la préfecture. Ensuite, ils ont enfoncé les portails de deux bases logistiques, l'une de Lidl et l'autre d'Intermarché, avant d'y déverser du marc de raisin et de mettre là aussi le feu à des palettes.
Cette manifestation est "non déclarée", a précisé la préfecture de l'Hérault dans un communiqué, en annonçant l'activation d'une cellule de crise et la mobilisation des forces de sécurité et de secours.