Vers 21 heures, la place de la République à Paris était noire de monde. Les manifestants, parmi lesquels beaucoup de jeunes, majeur levé, hurlaient: "La jeunesse emmerde le Front national" (parti ancêtre du Rassemblement national, RN) ou encore "Tout le monde déteste Marine Le Pen".
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Alice, 24 ans, étudiante, tenait à être là parce que, dit-elle, "maintenant l'extrême droite (est) aux portes du pouvoir". "La perspective d'avoir un Premier ministre d'extrême droite dans trois semaines, ça me terrifie." Alba Bourreau, 19 ans, étudiante en arts, participe à sa "première manifestation politique", après avoir voté dimanche pour la première fois. Elle "espère que le 'front populaire' à gauche va suffire. En attendant, je suis prête à venir manifester autant qu'il le faudra".
"Front populaire: tous unis"
Dans la foule alentour, les drapeaux palestiniens se mêlent à ceux de la CGT, de l'Unef et d'autres organisations ayant appelé au rassemblement. Certains manifestants brandissent des pancartes mentionnant "Ça va barder là", en référence au président du RN Jordan Bardella. Aucun dispositif policier n'était visible, selon le journaliste présent sur place.
A Marseille, deuxième ville de France, qui a placé en tête la liste du RN lors du scrutin des européennes dimanche, 2.200 personnes selon la police, dont beaucoup de jeunes, se sont rassemblées à l'appel de plusieurs syndicats, de partis de gauche ou de la Ligue des droits de l'Homme devant la préfecture de région. "L'extrême droite au pouvoir ne le lâchera plus, combattons-la maintenant !" ou "Front populaire: tous unis", proclamaient des pancartes fabriquées à la va-vite. De nombreux élus locaux, en écharpe tricolore, étaient présents.
Plusieurs milliers de personnes se sont également rassemblées à Rennes (plus de 2.500), Nantes (au moins 1.000) et Rouen (800). Dans la capitale bretonne, Maël, étudiant de 19 ans, "ne veux pas vivre dans une France gouvernée par le RN", se rappelant que ce ne serait "pas la première fois dans l'Histoire que le fascisme arrivera(it) au pouvoir par les urnes". "Macron leur a ouvert la porte avec sa politique et la dissolution mais il n'est pas trop tard pour leur claquer sur la figure!", a-t-il ajouté.
"Des racines et des haines"
Quelque 1.500 personnes, selon la préfecture, se sont également rassemblées place de la Victoire à Bordeaux, au rythme de tambours et de la mélodie de "Bella ciao". "FN, RN des racines et des haines", "Non à l'ère Haine", ou encore "Make racistes afraid again", pouvait-on lire sur des pancartes.
"Je ne comprends vraiment pas cette décision de dissolution. En trois semaines, il ne peut pas y avoir d'alliance solide face au RN", craint Muriel Jules, une retraitée de 82 ans. L'atmosphère galvanise Julia T., 30 ans: "Quand j'étais petite, j'avais assisté de loin à travers la télé à la mobilisation suite au passage de (Jean-Marie) Le Pen au second tour. Aujourd'hui à mon tour de descendre dans la rue pour crier mon refus d'une France repliée sur elle-même", dit la jeune femme de 30 ans.
A Montpellier ou encore Besançon, un millier de personnes ont aussi manifesté, de même qu'à Toulouse où ils criaient: "Pas de fachos dans les quartiers, pas de fachos à l'Assemblée!". Parmi la foule toulousaine, Matthieu Chêne, un jeune homme de 30 ans, pour qui il était "essentiel de venir (...) pour être du bon côté de l'Histoire". "J'espère qu'il y aura un Front populaire. Il faut que Roussel, Glucksmann, Mélenchon, tout le monde mette son égo de côté!"
A Strasbourg, ils étaient 950 selon la police. "L'extrême droite a inoculé tous les rangs de l'Assemblée nationale jusqu'à la Macronie.(...) Il y a dans ce pays un racisme d'Etat, je le vois à l'Assemblée nationale. Ne les laissons pas faire!", a lancé au micro le député LFI Emmanuel Fernandes. "Nous prendrons nos responsabilités pour que le 30 juin, nous nous présentions en un front uni, humaniste" a promis l'élu.