Faut-il déboulonner la statue de Jean-Baptiste Colbert devant l'Assemblée ? La question fait débat depuis plusieurs jours alors que des statues de personnages historiques controversés sont enlevées par des manifestants aux États-Unis ou au Royaume-Uni, notamment celles de Christophe Colomb. En France, celle du ministre de Louis XIV et père du Code Noir, sur le parvis de l’Assemblée nationale est sous le feu des critiques, comme d'autres figures historiques. Des polémiques qui existent depuis longtemps aux Antilles et notamment en Martinique ou plusieurs statues ont été mise à terre.
"La forme est un peu brutale, mais le fond est vrai"
À Fort-de-France, cela fait bientôt 30 ans que la statue de Joséphine De Beauharnais a été décapitée. La tête de la statue de cette martiniquaise, qu’on accuse d’avoir poussé Napoléon à rétablir l’esclavage, a été coupée par un collectif anonyme en 1991. Même étêtée, elle attise toujours la curiosité et le débat chez les passants. Pour Aline, "la forme est un peu brutale, mais le fond est vrai. Pourquoi est-ce qu'il faut toujours mettre en avant l’oppresseur et ne jamais mettre nos héros en statues ?".
Le mois dernier, des militants ont aussi fait tomber deux statues de Victor Schoelcher, l’homme qui a fait voter la loi d’abolition de l’esclavage. Ils lui reprochent notamment d’avoir indemnisé les colons après l’affranchissement, et demandent que des statues de héros noirs soient érigées à la place.
"Colbert doit être déplacé ou expliqué"
Mais la critique porte donc aussi sur des statues présente en France métropolitaine, à commencer par celle de Colbert devant l'Assemblée. "En 2006, je faisais partie du collectif Devoirs de mémoires. On avait recouvert toutes les statues d'anciens esclavagistes qui sont représentés devant l'Assemblée nationale par des draps noirs", se souvient Sandra. Il y a deux ans, Victorin Lurel, ancien ministre des Outre-mer et aujourd’hui sénateur de Guadeloupe, avait demandé au Sénat à ce que la statue de Colbert devant le palais Bourbon soit retirée. "Nous ne sommes pas entendus. Et ce n'est pas faute de combats, de luttes, de lettres, de pétitions. Ce n'est pas un sujet pour les élus. Colbert doit être déplacé ou expliqué."
C'est plutôt cette seconde option qu'a semblé privilégier Frédéric Potier, délégué interministériel à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT (Dilcrah), invité d'Europe 1 samedi. "L’histoire de France un bloc avec ses parts d’ombre et de lumière. Je pense que ces parts d’ombres, ces périodes difficiles, il faut les connaître, les apprendre, en faire la pédagogie. Je pense que l’on a plutôt intérêt à laisser une plaque avec un nom de rue, une statue mais d’expliquer pourquoi elle est là."