En France, une femme décède tous les trois jours sous les coups de son conjoint ou d’un ex-conjoint. En dépit des efforts entamés par les pouvoirs publics, ce chiffre ne baisse pas. Samedi, un collectif de familles et de proches de victimes organise un grand rassemblement à Paris, ils demandent notamment au gouvernement de mettre en place une chaîne des responsabilités, qui permette de mieux venir en aide aux femmes en situation de détresse.
"Malheureusement, en fonction de là où vous habitez, vous n’êtes pas protégée de la même manière. C’est assez insupportable", déplore au micro de Nikos Aliagas, dans la matinale d’Europe 1, Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des femmes.
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Cette responsable associative dénonce une importante disparité dans les dispositifs mis en place à l’échelle des territoires. "On sait qu’à Versailles, par exemple, il est très compliqué d’avoir des ordonnances de protection parce que les juges des affaires familiales, là-bas, trouvent que ça n’est pas efficace. Dans d’autres territoires, comme en Seine-Saint-Denis, il y a des expérimentations sur un tas de mesures. Ils innovent", relève-t-elle. "En fonction des régions, on a des dispositifs qui sont plus ou moins bien mis en place."
D’autant que les violences faites aux femmes concernent tous les milieux et toutes les catégories socio-professionnelles : "Les violences faites aux femmes existent partout, il n’y a pas d’idée de quartier. Quand on regarde le profil des 70 femmes mortes depuis janvier [sous les coups d’un conjoint ou d’un ancien conjoint, ndlr], il y a des cheffes d’entreprise, des femmes de ménage, des mères aux foyer. Il y a de tout, la violence faite aux femmes est dans tous les milieux."
Un "grenelle des violences faites aux femmes"
Une circulaire a été envoyée en mai aux procureurs généraux de la République par les services du ministère de la Justice pour leur demander de prioriser ce sujet, dont Emmanuel Macron a fait la grande cause de son quinquennat. "On encourage madame Belloubet [la ministre de la Justice, ndlr] à aller plus loin et même à demander des objectifs chiffrés à ses équipes", explique Anne-Cécile Mailfert. "Il y a des juges qui, clairement, n’ont pas mis certains dossiers au sommet de la pile", dénonce-t-elle. "Il y a des manquements, des défaillances. La saisine de l’inspection générale de la justice fait aussi partie de nos demandes. On aimerait la même chose dans les commissariats pour savoir, quand une femme est morte assassinée, s’il y a aussi eu des manquements et des défaillances."
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Anne-Cécile Mailfert rappelle ainsi que c’est généralement au moment où une femme alerte les forces de l’ordre sur sa situation qu’elle s’apprête à être victime des coups de son compagnon ou d’un ex. "Lorsqu’une personne est menacée de mort, si elle demande de l’aide et qu’on la renvoie chez elle, on l’expose à un danger très grave", pointe-t-elle, dénonçant de la "non-assistance à personne en danger".
Pour sauver davantage de vies et permettre aux services publics d'agir avec plus d'efficacité face à certaines situations, Anne-Cécile Mailfert appelle donc à la tenue d'un "grenelle des violences faites aux femmes". "Pour accompagner cette grande cause, rien de tel qu’un grand moment, dans lequel on rassemble tous les acteurs impliqués dans la protection des femmes victimes de violences", enjoint-elle. "Qu’ils en ressortent avec des objectifs chiffrés sur ce qu’il faut faire, et que tous les ministères, Castaner à l’Intérieur, Belloubet à la Justice, Buzyn à la Santé, mettent le dossier des féminicides en haut de la pile !"