La justice progresse dans l'enquête sur les soupçons de financement par la Libye de Kadhafi de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007. Les enquêteurs ont étendu leurs investigations à la vente suspecte d'une villa attribuée à l'homme d'affaires Alexandre Djouhri à un fonds libyen. Cette villa située à Mougins, dans le sud de la France, a été vendue officiellement en 2009 pour environ 10 millions d'euros au Lybian African Portfolio (LAP), un fonds libyen géré par l'ancien argentier de Mouammar Kadhafi, Bachir Saleh, qui vit aujourd'hui en Afrique du Sud, selon des éléments de l'enquête révélés par Le Monde, et dont l'AFP a eu connaissance.
Des relations étroites entre Sarkozy et Djouhri. D'après ces éléments, les investigations menées par les juges d'instruction, et notamment les écoutes téléphoniques effectuées entre 2013 et 2015, montrent par ailleurs des relations étroites entre Nicolas Sarkozy et Alexandre Djouhri. Dans des demandes de coopération judiciaire internationale, les juges détaillent leurs soupçons : les fonds transférés par le LAP à une société écran, Bedux, seraient très supérieurs pour une telle "propriété en ruine", évaluée en 2009 à moins de deux millions d'euros et achetée selon eux en 1998 par Alexandre Djouhri pour 5 millions de francs, soit environ 760.000 euros.
Les juges soupçonnent qu'Alexandre Djouhri et Bachir Saleh se sont entendus pour faire acquérir par le LAP cette villa à "un prix très surévalué", et qu'une partie en est revenue à Bachir Saleh, l'ancien argentier de Kadhafi. Contacté par l'AFP, l'avocat d'Alexandre Djouhri, Me Pierre Cornut-Gentille, n'a pas répondu dans l'immédiat.
Une enquête ouverte depuis 2013. Alexandre Djouhri, qui réside en Suisse, ne s'est pas présenté à une convocation des enquêteurs de l'Office anticorruption de la police judiciaire (Oclciff) le 7 septembre, pas plus que Bachir Saleh. Les juges d'instruction enquêtent depuis 2013 sur des accusations de financement libyen de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, formulées par d'anciens dignitaires du régime Kadhafi, puis par l'intermédiaire Ziad Takieddine. Pour l'instant, ils ne disposent pas des preuves d'un tel financement.
L'ancien secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant, a été mis en examen dans l'un des volets du dossier pour faux, usage de faux et blanchiment de fraude fiscale en bande organisée, en raison d'un virement suspect de 500.000 euros qu'il a justifié par la vente de deux tableaux flamands à un avocat malaisien, sans convaincre les juges. Les enquêteurs tentent de déterminer des liens entre ce virement et des hommes liés à Alexandre Djouhri.