"Celui qui marquera l'histoire avec votre sang." C'est ainsi que Killian, 16 ans, fils d'un conseiller municipal de Grasse, se présente sur sa page Youtube. En photo de profil, on le voit faire un doigt d'honneur assis sur un banc, le visage masqué par une capuche et un masque à gaz. Derrière, l'image utilisée comme bannière est tirée du film de vidéosurveillance du lycée de Columbine, le 20 avril 1999, quand deux lycéens avaient tué 13 personnes.
Des illustrations qui font froid dans le dos quelques heures après l'interpellation de l'élève de première L dans son établissement de Grasse, dans les Alpes-Maritimes. Armé d'un fusil, d'un pistolet, d'un revolver et de deux grenades, l'adolescent y a tiré sur son proviseur et plusieurs camarades, blessant quatre personnes par balles.
Clowns, squelettes et morts-vivants. Sur son compte Facebook, aucune trace du vrai visage de Killian. Dans ses albums, on trouve, pêle-mêle, des clowns, des squelettes, des morts-vivants et des photos de membres du GIGN. "Tu mais toujours que des trus gors lol (sic)", commente l'un de ses amis. Sur le profil d'un autre de ses contacts, qui "like" régulièrement ses photos, est partagé un cliché de T.J. Lane, un garçon de 17 ans auteur d'une fusillade mortelle dans l'Ohio, aux Etats-Unis, en 2012.
Un film de 7 secondes, partagé sur ce compte, montre une personne en sweat-shirt, à la tête recouverte par un masque à gaz et un masque de clown, tendre un pistolet, factice ou non chargé. Il tire une première fois en direction de la caméra, puis deux fois vers sa tête. Comme seule bande-son, on entend trois petits "clics". "Il y a mon masque à gaz", répond le jeune homme en commentaires, semblant suggérer que c'est lui que l'on voit sur la vidéo.
Fascination pour les tueries de masse. Sur le profil Youtube de Killian, on trouve en outre plusieurs éléments semblant indiquer une certaine fascination pour les tueries de masse. Dans une playlist intitulée "Columbine", il partage une chanson du groupe Ill Bill, intitulée The Anatomy Of a School Shooting (l'anatomie d'une fusillade scolaire). On peut également voir l'intégralité du film "Zero day", toujours inspiré de la fusillade de Columbine. Deux jeunes lycéens se sentant exclus y décident d'éliminer tous leurs camarades.
Ces éléments, ajoutés au déroulé de la fusillade, ont rapidement poussé les enquêteurs à exclure la piste du terrorisme, jeudi. "On est plutôt sur quelqu'un qui semble avoir des problèmes psychologiques", a indiqué le président (LR) de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, Christian Estrosi. Les motivations du tireur, en garde à vue jeudi soir, pourraient être liées "aux mauvaises relations qu'il entretiendrait avec d'autres élèves", a ajouté la procureure de Grasse, Fabienne Atzori. La ministre de l'Éducation, Najat Vallaud-Belkacem, a elle évoqué "l'acte fou d'un jeune homme fragile et fasciné par les armes à feu".