Deux anciens bourgmestres rwandais ont vu vendredi leur condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité confirmée en appel par la justice française pour leur participation au génocide des Tutsi dans leur village de Kabarondo, dans l'est du Rwanda, en avril 1994.
À l'issue de deux mois d'un procès filmé pour l'histoire devant la cour d'assises de Paris, Octavien Ngenzi, 60 ans, et Tito Barahira, 67 ans, ont été jugés coupables de "crimes contre l'humanité" et "génocide", pour "une pratique massive et systématique d'exécutions sommaires" en application d'un "plan concerté tendant à la destruction" du groupe ethnique tutsi.
Le verdict a été accueilli dans un pesant silence, à peine troublé par les sanglots discrets de la famille des accusés. Les deux anciens bourgmestres sont restés stoïques, vite entourés par leurs avocats. Ils ont cinq jours pour former un éventuel pourvoi en cassation.
Des "artisans de la mort". L'accusation avait désigné les accusés comme des "artisans de la mort" ayant "pleine autorité" dans leur village, des rouages essentiels du génocide dans leur commune de Kabarondo. Une période de sûreté des deux tiers avait en outre été demandée pour Ngenzi, bourgmestre en exercice en 1994 et à ce titre "responsable de tous les morts de la commune".
Découpés à la machette. Les deux hommes, qui se sont succédé à la tête de la commune de 1976 à 94, ont nié jusqu'au bout toute participation aux tueries à Kabarondo, où le pire des massacres eut lieu le 13 avril à l'église. Près de 2.000 morts, selon l'abbé, pilonnés au mortier, puis découpés à la machette, pendant près de sept heures.
Un ancien capitaine de l'armée condamné à 25 ans de prison. "Cette décision est juste et c'est un message: stop à l'impunité pour tous ceux qui ont pris part au génocide et qui ont cru pouvoir se réfugier en France", a réagi Alain Gauthier, président d'une association à l'origine de la plupart des enquêtes françaises sur le génocide rwandais. C'est la deuxième fois que la justice française, qui a jugé ces hommes en vertu de sa compétence universelle pour les crimes les plus graves, se prononce dans un dossier lié au génocide rwandais, après la condamnation de l'ancien capitaine de l'armée, Pascal Simbikamgwa, à 25 ans de réclusion criminelle.