Grenoble : les habitants sous le choc après l'incendie d'une bibliothèque
Une bibliothèque du quartier Mistral de Grenoble a été incendiée dans la nuit de mardi à mercredi. L'incendie est survenu peu après minuit, après une soirée de violences urbaines dans ce quartier classé prioritaire du sud-ouest de la capitale iséroise.
"Écœurés" : des habitants regardent dépités mercredi la façade détruite de la bibliothèque dans le quartier Mistral de Grenoble, incendiée dans la nuit par une voiture-bélier, après des violences urbaines dans ce quartier populaire. L'incendie est survenu peu après minuit, dans ce quartier classé prioritaire du sud-ouest de la capitale iséroise.
"Une action de riposte"
Depuis le début de la semaine, les policiers grenoblois ont mené plusieurs actions dans le quartier contre les trafiquants de drogue. Deux arrestations ont eu lieu ce mardi dans la journée, ainsi que des saisies de stupéfiants. Dès 20 heures, des équipages de police (Brigades spécialisées de terrain, BST) et des CRS avaient subi des jets de projectiles, sans être atteints, a indiqué une source policière. Les jets se sont poursuivis dans la soirée, ainsi que des tirs de mortiers, qui n'ont fait ni blessé ni dégradation.
Puis, peu après minuit et non loin de là, une voiture est lancée contre la bibliothèque puis incendiée. C'est ce qui fait dire ce mercredi à la préfète de l'Isère, Catherine Séguin, qu'il s'agit probablement de représailles : "Oui, une action de riposte très vraisemblable de la part des narcotrafiquants et clairement la manifestation par la violence, de la part des narcotrafiquants, du fait que la présence policière les dérange". Une enquête est en cours. Aucune interpellation n'a eu lieu pour l'heure.
Des dégâts "colossaux"
Mercredi matin, des équipes spécialisées examinaient la structure en partie brûlée de la bibliothèque Chantal-Mauduit, inaugurée récemment, a constaté l'AFP. La carcasse de la voiture totalement calcinée, encastrée dans les restes de la façade, a été lancée volontairement dans l'entrée, selon le récit d'une source policière. Le véhicule a été enlevé des lieux en milieu de matinée.
"Le bâtiment est entièrement inutilisable, les dégâts sont colossaux", n'a pu que constater sur place Lucille Lheureux, adjointe au maire. "Nous sommes à la fois écœurés, touchés, affectés par cet acte, mais nous sommes aussi déterminés à faire vivre ce service public", a-t-elle déclaré à la presse.
L'élue a condamné "fermement cet acte d'une violence inouïe" qui vient cibler "un équipement qui est au bénéfice de familles, d'enfants, tout au long de la journée". Un groupe de trois jeunes mères regardaient les pompiers travailler depuis le trottoir d'en face: "On est attristées et dégoûtées. Nos enfants sont scolarisés là, ils y vont tous les jours. Il y avait aussi de l'escalade et du taekwondo, des ordinateurs en libre accès".
"Quand j'ai vu ça, j'ai pleuré, ça me dégoûte pour les gosses. Nos enfants ont des activités scolaires ici. La bibliothèque venait d'être rénovée", déplore Tatiana, l'une des trois femmes. "Il va falloir se rabattre sur d'autres structures. Du coup il n'y a plus rien dans le quartier", regrette aussi Lexou, qui l'accompagne.
Inaugurée en décembre
La bibliothèque avait été inaugurée en décembre, sur un site qui accueillait précédemment un lieu de "culture populaire", fermé en 2023. L'espace permet de profiter d'une grande bibliothèque mais aussi d'un mur d'escalade et d'un dojo. Une salle d'activités collectives de médiation culturelle a également été créée.
Un groupe de trois collégiens de 6e du collège Aimé-Césaire, à proximité, commentait avec animation mercredi devant les barrières de sécurité. Rayan faisait de la lutte dans le bâtiment brûlé. "Avant, il y avait des problèmes ici et du coup, ils ont fait une bibliothèque. On ne reconnaît plus, ici, c'était l'accueil", dit-il. Ils se disent "un peu tristes" que le lieu soit détruit.
Les équipes en intervention mercredi matin sont en train d'effectuer "le diagnostic de ce bâtiment" pour estimer si et comment la structure doit être sécurisée, a expliqué Lucille Lheureux, saluant au passage les pompiers qui ont eu le réflexe "de mettre de côté le plus possible de collections".
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau s'était rendu à Grenoble vendredi sur le thème de la sécurité, une visite qui, hasard du calendrier, est intervenue au lendemain d'une attaque à la grenade dans un bar associatif. L'incident, qui a fait une douzaine de blessés, avait relancé le débat autour de la sécurité à Grenoble, où les fusillades liées au trafic de drogue sont régulières.