Le mouvement de grève contre la réforme des retraites entre jeudi dans son 29e jour. Après presque un mois de mobilisation, le conflit ne semble pas être en mesure de se régler dans les prochains jours, les manifestants comme le gouvernement campant sur leurs positions. Alors que les fêtes de fin d'année sont passées, de nombreuses questions se posent sur la poursuite du mouvement : va-t-il se renforcer, ou au contraire faiblir ? Les grévistes pourront-ils tenir encore longtemps ? Europe 1 fait le point.
Quelles perturbations attendre pour le retour des vacances ?
Dès jeudi, il faut s'attendre à un niveau de perturbations proche de ce que l'on a connu autour du 15-20 décembre. Le trafic sera très perturbé à la SNCF, notamment parce que l'UNSA Ferroviaire, 2ème syndicat de la compagnie, avait annoncé faire une trêve pendant les Fêtes, et même s'ils ne sont pas majoritaires chez les conducteurs, cela aura un impact. Dans chaque syndicat, il y a des cheminots (conducteurs, contrôleurs, aiguilleurs) qui ont stoppé la grève pendant quelques jours, soit parce qu'ils avaient posé des congés soit pour faire en sorte de ne pas avoir une feuille blanche en guise de bulletin de salaire à la fin du mois.
La situation est assez similaire du côté de la RATP. Certains conducteurs ont repris le travail quelques jours pendant les fêtes mais ils ont bien l'intention de reprendre la grève la semaine prochaine. Avec le retour des fortes affluences aux heures de pointe, il sera facile de constater s'il y a une réelle reprise du travail. Toujours à la RATP, le recours aux arrêts maladie, qui ont explosé en décembre dernier, est clairement revendiqué comme l'une des manières de faire durer le mouvement, en se rendant indisponibles pour l'entreprise.
Les grévistes peuvent-ils tenir ?
Les grévistes vont également être confrontées à la question financière : peuvent-ils compter sur les caisses de grèves, les cagnottes en ligne, et est-ce que cela permet vraiment de tenir ? Les différents syndicats répondent que c'est à la fois indispensable pour permettre aux plus bas salaires de faire grève, aux couples de cheminots ou aux familles monoparentales de ne pas se mettre totalement dans le rouge, mais que ce n'est jamais suffisant pour couvrir toutes les pertes de salaires et de primes non perçues.
"La réforme des retraites a été mal conduite", estime Pierre Ferracci, proche d'Emmanuel Macron
Il y a donc des cagnottes en ligne, dont l'une a déjà recueilli plus d'1,2 million d'euros. Mais les modalités de répartition ne sont pas arrêtées, cela se fait souvent une fois la grève terminée. Les caisses de grève locales servent plutôt à financer des repas, lors des rassemblements sur les piquets de grève notamment : quelques milliers d'euros, par exemple, sur la zone Paris Sud-Est pour plusieurs centaines de grévistes. Les versements de ces sommes aux grévistes se veulent transparents, décidés lors des assemblées générales, et pas forcément attribuées par un syndicat à ses membres. Les grévistes non syndiqués peuvent aussi en bénéficier, c'est par exemple ce qu'il s'était passé pour Sud Rail lors de la grève de 2018.
29 jours de grève dans les transports, c'est du jamais vu. A la SNCF, même les leaders syndicaux les plus durs contre la réforme des retraites n'imaginaient pas que cela dure jusqu'en 2020. En choisissant le 5 décembre (date de la première mobilisation), il y avait cette volonté de bras de fer avec Noël en ligne de mire. Mais la base, les grévistes dans les assemblées générales, syndiqués ou pas d'ailleurs, ont choisi jour après jour de reconduire le mouvement.
C'est ce qu'il s'est passé le 20 décembre quand il a fallu décider de faire une trêve ou pas : à l'UNSA Ferroviaire, certains n'ont pas suivi le mot d'ordre de leur syndicat. Le gouvernement était persuadé d'avoir obtenu cet appel à la trêve de la CFDT Cheminots mais finalement, après des discussions musclées en interne, le quatrième syndicat à la SNCF était resté dans le mouvement de grève reconductible. Maintenant, les grévistes se disent qu'ils ont déjà perdu une vingtaine de jours de salaire, et ne veulent pas abandonner sans rien obtenir. C'est particulièrement vrai à la RATP, où les syndicats avaient annoncé la couleur dès le début : "on tiendra un mois s'il le faut", et c'est ce qui s'est passé.