La décision vient éclaire sous un jour nouveau une question très délicate : à partir de quel moment le harcèlement sexuel peut-il être retenu comme motif de licenciement pour faute grave d'un salarié ? La Cour de cassation s'est récemment prononcée sur la question, explique notre chroniqueur Roland Perez, avocat.
Un licenciement pour faute grave
Tout commence par des SMS nourris et prolongés, de nature sexuelle voire pornographique - non contestée -, envoyés par un cadre d’une entreprise à l’une de ses employées. Des envois répétés pendant deux ans, jusqu'à ce que la salariée n'alerte sa hiérarchie. Celle-ci limoge alors le cadre pour faute grave.
Le motif retenu est évidemment le harcèlement sexuel exercé sur la salariée, démontré par les messages reçus sur le téléphone de l’employée. Il faut rappeler que l’employeur doit, selon le code du Travail, protéger ses salariés au nom de l’obligation de sécurité aussi bien morale que physique.
Mais le cadre a contesté son licenciement, jusqu'à l'intervention, en bout de chaîne, de la Cour de cassation. Les magistrats de la plus haute juridiction ont alors estimé que le harcèlement sexuel d’un salarié a l’encontre d’un collègue n’existait véritablement que si la victime n’avait pas eu, de son coté, un comportement équivoque, familier, voire de séduction à l’égard du prétendu harceleur.
Un jeu de séduction jugé réciproque
Car dans cette affaire, il était démontré que dans les propres SMS de la salariée en réponse aux messages à connotation sexuelle reçus, le refus d'être harcelée n’était pas clair. Les échanges semblaient révéler un jeu de séduction réciproque, où jamais, dixit la Cour de cassation, il n'avait été demandé par l’employée destinataire des SMS d’arrêter. Certains messages semblaient au contraire encourager l'auteur à continuer.
Pour autant, subtilité de la décision rendue : le licenciement n'a pas été jugé abusif. Car si le harcèlement sexuel n’a pas été retenu, le comportement du directeur demeurait critiquable. Celui-ci occupait un poste à responsabilité et la salariée qui se plaignait du harcèlement était sous ses ordres. L'homme a donc seulement pu, a minima, recevoir le paiement de son préavis et des indemnités de licenciement dont il avait été privé.