C’est une nouvelle tentative de déstabilisation identifiée par le renseignement français. Il y a un mois, l’organisme Viginum, chargé de lutter contre les ingérences numériques étrangères, pointait le rôle de l’Azerbaïdjan sur les réseaux sociaux visant à porter atteinte à la réputation de la France dans sa capacité à accueillir les Jeux olympiques l’été prochain. Selon les informations d’Europe 1, une nouvelle manche de cette guerre de l’ombre entre Paris et Bakou s’est jouée la semaine dernière lors du déplacement du ministre des Armées, Sébastien Lecornu, à Nouméa en Nouvelle-Calédonie, qui entendait dynamiser la stratégie de défense française dans la région.
Deux femmes de nationalité azerbaïdjanaise se présentant comme journalistes ont été discrètement passées au crible par les services français alors qu’elles venaient "couvrir" cette tournée du ministre dans l’Indo-Pacifique.
Refoulée vers Singapour
La première, bien connue du contre-espionnage français pour sa proximité avec un service de renseignement étranger, a été autorisée à rentrer sur le territoire. Elle s’est rendue à la manifestation organisée par l’Union Calédonienne (UC), parti politique qui milite pour l’indépendance et qui avait organisé un rassemblement pour dénoncer la visite du ministre des Armées. Elle a par ailleurs écrit des articles pour l’agence d’information d’Etat de l’Azerbaïdjan, Azertac. "Avec un angle anti-France", précise une source proche du dossier.
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La seconde femme a, quant à elle, été placée en zone d’attente et renvoyée vers Singapour, pays de transit, pour défaut de visa, selon une source sécuritaire. Azertac a qualifié cette expulsion de "déportation injustifiée de sa journaliste".
Ingérence de l’Azerbaïdjan dans les affaires françaises
La tension diplomatique est montée d’un cran ces derniers mois entre Paris et Bakou. La France a accusé l’Azerbaïdjan de "nettoyage ethnique" en Arménie. Elle a par ailleurs livré à Erevan 24 "Bastion", des véhicules blindés de transport de troupes construit par Arquus. 26 autres blindés de ce type sont en cours de production, ce qui n’est évidemment pas du goût de l’Azerbaïdjan.
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Parmi les griefs français, Bakou recevait en juillet dernier en marge du sommet ministériel du Mouvement des Non-Alignés une table ronde avec les indépendantistes calédoniens, martiniquais et polynésiens, pointant les "méfaits des politiques de l’Etat colonial français". Réunis à nouveau fin octobre dernier, la rencontre avait conduit le président azerbaïdjanais, Ilam Aliyev, à écrire une lettre au secrétaire général des Nations Unies, considérée comme particulièrement virulente à l’égard de la France, selon la version de Paris. Les mêmes indépendantistes qui ont organisé la semaine dernière une manifestation contre la venue du ministre français.
Ces tensions interposées entre la France et l’Azerbaïdjan devraient, selon une source informée, redescendre d’un cran dans les prochains jours. Car après des mois d’impasse, Bakou et Erevan sont sur le point de signer un accord de paix.