Plusieurs centaines de personnes ont constitué dimanche une chaîne humaine près d'un barrage de l'Isère pour protester contre l'ouverture à la concurrence d'une partie du parc hydroélectrique français, envisagée par le gouvernement dès 2018.
Réunis à l'initiative du Parti communiste, élus locaux, syndicats et sympathisants se sont alignés vers 14h sur un pont surplombant le barrage du Sautet, à Corps, pour s'ériger symboliquement contre une "logique libérale" qu'ils jugent "contraire à l'intérêt général". "Non à la privatisation de l'hydroélectricité" et "Non à la privatisation des barrages", pouvait-on lire sur deux grandes banderoles déployées sur les barrières de sécurité du pont, tandis qu'un rassemblement semblable se tenait au même moment dans l'Indre.
Manifestation au barrage du Sautet (Isère) contre l’ouverture à la concurrence des barrages hydroélectriques #EDF. Une chaîne humaine de près de 400 syndicalistes CGT, élus de tous bords, militants et citoyens. pic.twitter.com/e3NOHhW1ZS
— François Carrel (@FrancoisCarrel) 8 avril 2018
"Nous lançons un appel à la mise sous protection publique et citoyenne de tous les barrages en France. La logique dans laquelle le gouvernement s'engage risque de conduire à la privatisation de cette ressource utile à la transition écologique", a souligné le secrétaire national du PCF Pierre Laurent.
Le barrage du Sautet est sous protection citoyenne ! Non à la privatisation des barrages hydrauliques pic.twitter.com/q9aUj9ZZNY
— PCF (@PCF) 8 avril 2018
150 ouvrages ouverts à la concurrence d'ici à 2022. Début janvier, le gouvernement Macron a transmis à l'UE une liste de 150 ouvrages hydroélectriques - sur les 400 du parc français - pouvant être ouverts à la concurrence d'ici à 2022. Parmi eux les barrages alpins de Lac Mort, Drac amont, Beaufortain et Super Bissorte pourraient être les premiers proposés à un rachat dès 2018. Les manifestants reprochent au gouvernement d'avoir cédé en catimini à une injonction de l'Union Européenne, qui fait pression sur la France depuis plusieurs années pour que soit mis un terme au monopole historique d'EDF.
"Dommages collatéraux". "L'injonction de l'UE se base sur un argument qui ne tient plus car ce monopole s'affaisse un peu plus chaque année. Dès lors, pourquoi la France engage-t-elle cette ouverture alors qu'elle a auparavant toujours résisté ?", s'interroge Fabrice Coudour, secrétaire général CGT Energie Savoie. Le responsable syndical, qui prédit des "dommages collatéraux" dans divers secteurs comme le tourisme, souligne l'importance de manœuvrer dans "une logique de défense des concessions au travers des Services d'intérêt généraux (SIG)". "On veut disséminer ce patrimoine dans les mains d'opérateurs privés qui auront d'autres objectifs, et notamment ceux d'engranger des profits", déplore Pierre Laurent, rappelant que l'État "a beaucoup d'argent à faire" car "ces barrages sont aujourd'hui largement amortis".
Auteure en 2013 d'un rapport parlementaire sur les concessions hydroélectriques, la député PS Marie-Noëlle Battistel constate de son côté le "manque de réciprocité" dans la plupart des autres pays européens, qui "se sont organisés pour échapper à cette mise en concurrence". "Une situation de monopole en amont n'empêche pas l'ouverture du marché à l'aval", insiste-t-elle.