Bruxelles, la capitale européenne, est-elle un foyer de l'islam radical ? Le plat pays, sept fois moins peuplé que la France, est tristement connu pour son quartier Molenbeek-Saint-Jean, couramment appelée "Molenbeek", laboratoire des attentats de novembre 2015 à Paris et du dernier en date en Belgique où deux suédois ont été abattus en octobre par un homme se revendiquant combattant de l'État Islamique. Europe 1 s'est rendue sur place.
"C'est du prosélytisme"
Sur un boulevard de l'hypercentre ou à Schaerbeek, un quartier plus populaire, l'islam rigoriste a pignon sur rue, à quelques kilomètres du Parlement européen. Dans la rue de Brabant, une librairie dévoile des personnages dessinés, dans des livres pour enfants, sans visage, conformément à une vision radicale de l'islam. "En réalité, c'est du prosélytisme", affirme Fadila Maaroufi, directrice de l'Observatoire des fondamentalismes à Bruxelles, qui dénonce l'augmentation du voile intégral.
"On n'avait pas autant de boutiques pour le voile intégral avant, vous en aviez une ou deux... Et surtout, avant, il n'y en avait pas pour les enfants. Une petite fille, qui doit avoir 9-10 ans, porte un voile intégral... À part le visage, tout le reste est couvert. Les petites filles sont sexualisées depuis toutes petites, c'est un véritable problème. Ça vient des pays du Golfe, Arabie Saoudite, Dubaï, Qatar...", poursuit-elle.
"C'est la politique de l'autruche"
Fadila est menacée de mort pour ses prises de position et marche dans l'angoisse, se sentant obligée de porter un masque chirurgical pour ne pas être reconnue dans la rue. Militante pour la laïcité, elle reçoit des signalements, principalement venant d'enseignants comme Raymonde. "C'est la politique de l'autruche. Lors des classes de dépaysement d'une semaine, il y a des enfants qui voulaient prendre leur tapis de prière. En primaire, il y a beaucoup de petites fêtes. Il y a des mamans qui ne voulaient pas que les enfants chantent et dansent, parce que c'est haram. Il y a des enfants qui ont des maux de tête parce qu'ils n'osent pas manger quand c'est le ramadan", témoigne cette ancienne directrice d'école à Bruxelles.
>> LIRE AUSSI - Séparatisme : comment les imams radicaux contournent la loi pour continuer de prêcher
La Belgique a-t-elle laissé infuser ce fondamentalisme islamique ? En Belgique, la laïcité est différente de la nôtre. Sept cultes sont reconnus et financés dont la laïcité. Les enfants choisissent un cours d'instruction religieuse à l'école publique parmi le christianisme, le judaïsme, l'islam ou des cours de morale pour les athées. Un terreau pour le rigorisme, selon Djemila Benhabib, politologue et fondatrice du collectif Laïcité Yallah, d'autant que la Belgique a confié la gestion du culte musulman à l'Arabie Saoudite dans les années 60. "C'est une monarchie extrêmement riche qui pouvait aussi offrir une certaine stabilité énergétique. À partir du moment où vous laissez rentrer le loup dans la bergerie, on n'a jamais encouragé des discours humanistes. La mosquée a eu un rôle à jouer dans la radicalisation de plusieurs profils. Et donc, après les attentats de Charlie Hebdo et du Bataclan, l'imam de la mosquée, qui était donc un diplomate saoudien, a été chassé", raconte-t-elle.
Un chaos organisationnel avec "la complaisance des pouvoirs publics"
Un chaos organisationnel dans lequel les Frères musulmans se seraient faits une place à Bruxelles, avec la complaisance des pouvoirs publics, dénoncent ces trois femmes qui réclament l'interdiction du voile islamique dans toutes les écoles. Les digues de la neutralité politique s'effondrent, selon elles, dans un silence très probablement électoraliste. Dans certaines communes de Bruxelles, près de la moitié des habitants sont de confession musulmane, il est donc préférable d'éviter le sujet.