Laura O. incarne le visage de la cupidité. Un mois après les attentats du 13-Novembre, la jeune femme de 24 ans avait tenté de se faire passer pour une victime afin de percevoir les aides qui leur sont destinées. Elle est jugée ce lundi devant le tribunal correctionnel de Versailles pour "escroquerie" et "tentatives d’escroquerie".
Le 22 décembre 2015, Laura O. se présente au commissariat des Mureaux. Le soir des attentats, assure-t-elle, elle était sur la terrasse du Carillon, l’un des bars visés par les commandos. Elle prétend avoir été "soufflée par une explosion" et "gravement blessée à un bras". Elle se présente d’ailleurs avec un bras en écharpe et de nombreux certificats médicaux prouvant qu’elle doit subir une greffe de peau. Elle fournit même une photo de sa blessure. Quinze jours plus tard, elle réitère son récit devant les enquêteurs de la police judiciaire de Versailles.
Faux certificat médical, photo trouvée sur Internet. En guise de réparation, elle demande 20.000 euros, insiste pour savoir quand elle pourra toucher l’argent. Un comportement peu habituel de la part d’une victime. D’autant que sa version des faits intrigue. Les enquêteurs de la PJ de Versailles décident de contacter la sous-direction antiterroriste de la police judiciaire (SDAT) qui ne tarde pas à souligner de nombreuses incohérences dans son récit. Elle parle d’une explosion alors qu’il n’y en a pas eu au Carillon : la terrasse a été visée par des tirs de kalachnikov. Par ailleurs, le nom de la "victime" ne figure sur aucune liste dressée par les hôpitaux dans les heures qui ont suivi le drame. Les enquêteurs appellent donc le médecin qui a fait l’ordonnance. Il ne l’a jamais reçu, il s’agit d’une usurpation. Quid de la photo ? Elle a été trouvée sur Internet, dans une affaire n’ayant rien à voir. Il suffisait de taper "bras brûlé" dans la barre de recherche Google.
Elle est à nouveau convoquée en février. Les policiers remarquent son ventre arrondi alors même qu’elle avait expliqué avoir fait une fausse couche à la suite des attentats. Acculée, la jeune femme reconnaît qu’il s’agissait d’un mensonge. Qui a néanmoins permis de berner le Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et la Maison départementale de l’autonomie, qui vient en aide aux personnes handicapées. "Depuis qu’elle a accouché, elle a compris qu’elle avait fait une bêtise", assure son avocat Me Michel Warné. "Ce n’était pas pour manquer de respect aux victimes, mais elle avait peur de ne pas avoir suffisamment d’argent pour élever leur futur enfant." Le père du nourrisson, chauffeur de bus à la RATP, n’aurait découvert l'arnaque que le jour de sa garde à vue. Sa compagne encourt jusqu'à cinq ans d'emprisonnement et 375.000 euros d'amende.
Exercice illégal de la pharmacie. Mais la jeune femme comparaîtra aussi le même dans une autre affaire pour "exercice illégal de la pharmacie". Selon son conseil, elle est poursuivie pour avoir fourni de faux diplômes afin de se faire embaucher dans deux officines. "Elle a fait croire qu’elle était docteure en pharmacie alors qu’elle n’a qu’un CAP de préparatrice », explique-t-il. Elle aurait également fait de faux certificats médicaux. "C’est une personne qui était un peu perdue, elle a fait de mauvais choix. Mais elle en est tout à fait consciente aujourd’hui."
En juillet, une autre fausse victime des attentats a déjà été condamnée à six mois de prison avec sursis pour "escroquerie". Hospitalisée le 13 novembre 2015 pour une intervention bénigne, elle avait tenté de faire croire au fonds de garantie qu’elle se trouvait au Bataclan ce soir-là. Elle avait été confondue par les nombreuses incohérences de son récit.