La Cour de justice de l'Union Européenne a jugé illégale, jeudi, l'interdiction en France de la commercialisation du cannabidiol (CBD), soulignant que cette molécule présente dans le chanvre (ou cannabis sativa) n'a "pas d'effet psychotrope ni d'effet nocif sur la santé humaine".
L'arrêt de la CJUE concerne le cannabidiol "légalement produit dans un autre État membre de l'Union européenne lorsqu'il est extrait de la plante de cannabis sativa dans son intégralité". Cet arrêt devrait priver de base légale de nombreux procès en France et ouvrir de nouvelles perspectives à l'industrie européenne et française du chanvre.
À l'origine, la condamnation de deux entrepreneurs marseillais
La justice européenne avait été saisie par la cour d'appel d'Aix-en-Provence, dans les Bouches-du-Rhône, qui devait statuer en octobre 2018 sur le sort de deux pionniers de la cigarette électronique au chanvre. La cour d'appel estimait en effet que la réglementation française pouvait ne pas être compatible avec celle de l'UE.
Les deux entrepreneurs marseillais, Sébastien Béguerie et Antonin Cohen, avaient été condamnés en première instance par le tribunal correctionnel de Marseille à 18 et 15 mois d'emprisonnement avec sursis, ainsi qu'à 10.000 euros d'amende. Les deux hommes se voyaient reprocher l'utilisation d'une huile légalement fabriquée en République tchèque contenant du CBD extrait de la totalité du cannabis sativa, feuilles et fleurs comprises, alors que la France n'autorise que l'usage des graines et des fibres.
Pas "d'effet nocif sur la santé humaine"
Dans son arrêt, la CJUE invoque "la libre circulation des marchandises" dans l'UE qui "s'oppose à une réglementation nationale" comme celle de la France, "dès lors que le CBD en cause (...) ne peut pas être considéré comme un stupéfiant".
L'interdiction de cette substance pourrait bien sûr "être justifiée par un objectif de protection de la santé publique". Cependant, la cour relève que "d'après l'état actuel des connaissances scientifiques, dont il est nécessaire de tenir compte, à la différence du tétrahydrocannabinol (communément appelé THC), un autre cannabinoïde du chanvre, le CBD en cause n'apparaît pas avoir d'effet psychotrope ni d'effet nocif sur la santé humaine". Or, la cour estime que "la juridiction nationale doit apprécier les données scientifiques disponibles afin de s'assurer que le risque réel allégué pour la santé publique n'apparaît pas comme étant fondé sur des considérations purement hypothétiques". "L'interdiction de commercialisation du CBD (...) ne saurait être adoptée que si ce risque apparaît comme suffisamment établi", affirme la CJUE.