Après la polémique sur les aides sociales qui coûteraient un "pognon de dingue", Emmanuel Macron joue gros sur le plan pauvreté, notamment vis à vis de l'électorat de gauche. Mais l'annonce mercredi par l'Élysée du report à septembre de la présentation du plan a suscité la colère des associations, notamment en raison du possible lien de ce report avec le parcours de l'équipe de France à la Coupe du monde.
Alors que le plan devait être présenté le 9 juillet, une source gouvernementale évoque auprès de l'AFP des "arbitrages" manquants et des sujets restants "à approfondir". Mais pour les associations, qui faisaient parti des six groupes de travail ayant remis en mars une liste de 110 propositions, la pilule est dure à avaler. Selon Eric Pliez, président du Samu social de Paris, il s'agit d'un "très mauvais signal". "On nous a dit mai, puis juin, puis juillet, maintenant septembre. On est en droit d'être déçus", ajoute-t-il auprès de l'AFP.
Déjà échaudées par l'annonce du report, les associations le sont encore plus par le possible lien de ce report aux résultats de l'équipe de France à la Coupe du monde en Russie, comme l'avait laissé entendre dès mercredi la ministre des Solidarités Agnès Buzyn sur lCI, "évoquant une question de disponibilité". "Nous verrons si l'équipe de France est en demi-finale ou pas", avait-elle indiqué. Emmanuel Macron avait en effet promis de se rendre dans le pays de Vladimir Poutine si les coéquipiers d'Antoine Griezmann atteignaient le dernier carré, pour lequel l'équipe de France jouera sa qualification vendredi.
"C'est indécent". "Je suis tout a fait indigné qu'on privilégie la Coupe du monde à l'attaque et la prise en compte des vrais problèmes", réagit Hubert Trapet, président d'Emmaüs, dans L'Obs. "Reporter ce plan pauvreté, c'est considérer que les pauvres peuvent attendre et ça, c'est indécent", ajoute le responsable.
D'autant plus que ce report de deux mois pourrait avoir des conséquences concrètes et directes sur les populations visées par le plan. "Il est évident que des mesures, comme l'accueil des plus jeunes ou des plus âgés pour la formation vont être décalées d'un an", ajoute le président d'Emmaüs.
"Une grande déception". "La misère n'attend pas et on va perdre une année", abonde Véronique Fayet, présidente du Secours Catholique, dans Le Monde. Des mesures rendues publiques comme l'offre de petits-déjeuners dans les écoles défavorisées sont en effet liées au calendrier scolaire. Et Véronique Fayet d'ajouter : "C'est une grande déception, alors que les propositions sont là, que la plupart des arbitrages étaient faits".
"Comme d'habitude, Emmanuel Macron décide seul". "Le football n'est évidemment pas la seule raison pour un report. Mais c'est sûr qu'on ne fait pas une annonce de cette ampleur un jour de foot", a précisé à l'AFP une source gouvernementale, plaidant pour donner au plan "une vraie exposition".
Dans l'hebdomadaire catholique La Vie, Etienne Pinte, président du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale s'agace lui que "comme d'habitude, Emmanuel Macron décide seul, et malgré toutes les concertations menées depuis six mois, personne ne sait ce qu'il va sortir du chapeau".
Le président de la République pourrait cependant dévoiler quelques grandes lignes du plan lundi, lors de son discours devant le Parlement réuni en Congrès à Versailles.
"On peut peut-être considérer que ce report du plan pauvreté est une possibilité d'aller plus loin", appelle plutôt Hubert Trapet, président d'Emmaüs. Et il y a urgence, la pauvreté touchant aujourd'hui 14% de la population.