Si vous pensiez éviter la pollution des grandes villes en vous réfugiant dans les couloirs du métro, une enquête de l'Agence nationale de sécurité sanitaire, publiée en mai dernier, pourrait vous conduire à revoir vos plans. Selon l'Anses, la qualité de l'air y est en effet trois fois plus dégradée qu'à l'extérieur, y compris à Paris. Au point que la RATP fait l'objet, depuis mercredi, d'une enquête ouverte par le parquet de Paris pour "mise en danger d'autrui et tromperie sur une prestation de services entraînant un danger pour la santé de l'homme". Une procédure qui découle d'une plainte déposée par l'Association Respire en mars 2021. Un fléau dénoncé à de nombreuses reprises et qui concerne, en réalité, l'ensemble des réseaux métropolitains de l'Hexagone.
Le freinage des rames mis en cause
Toujours en mai 2022, l'association Airparif, chargée de surveiller la qualité de l'air en Île-de-France, a publié un rapport, focalisé sur les enceintes ferroviaires souterraines de la RATP. Elle y dresse les principaux facteurs qui font du métro un lieu à risques pour nos poumons. "La principale source des particules riches en fer est l'usure des matériaux par la friction roue-frein, suivie du contact roue-rail et du contact entre le matériel roulant et le système d'alimentation électrique". Ce mécanisme d'abrasion - identique à celui des voitures - est d'autant plus polluant dans le métro que les rames utilisées sont parfois vétustes et les systèmes de freinage particulièrement sollicités.
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Dans son enquête parue l'année dernière, et uniquement centrée sur le réseau francilien, l'Anses mettait également en cause "la densité du trafic des trains, la configuration des stations et la performance du système de ventilation". En clair, la plupart des stations du métro parisien n'assurerait pas un renouvellement de l'air suffisant pour balayer les particules fines stagnantes et systématiquement remises en suspension à chaque passage de rame. Parmi les éléments susceptibles d'aggraver cette situation, l'Anses évoque en outre "la profondeur de la station, la qualité de l'air extérieur" et "la présence la nuit, en dehors des heures d'exploitation, de chantiers de rénovation (maintenance et renouvellement des voix)". Un dernier élément particulièrement visible dans le réseau parisien entre l'automatisation de la ligne 4, l'arrivée d'un nouveau matériel roulant sur la ligne 6 et les divers projets de prolongations de ligne.
La RATP se défend
Cette publication de l'Anses avait été précédée d'une étude réalisée en 2021 par AtmoSud, l'observatoire de surveillance de la qualité de l'air en région Provence-Alpes-Côte d'Azur, qui avait pour objet la concentration de particules fines dans le métro marseillais. Verdict : aucune station du réseau ne respectait la valeur maximale, préconisée par l'organisation mondiale de la Santé. Un constat déjà établi en 2019 et 2020 à Paris par l'association Respire, via des mesures réalisées dans plusieurs stations parisiennes. Et qui a donc conduit au dépôt de plainte de 2021. "Je ne suis pas contre la RATP à ce sujet. Mais je veux que les choses avancent plus rapidement. Je ne dis pas qu'ils font rien mais ce n'est pas suffisant tant en termes de transparence que d'actions menées", juge auprès d'Europe 1 Tony Renucci, président de Respire.
Des accusions battues en brèche par la régie qui préfère mettre en avant les dispositifs expérimentés pour juguler cette pollution : "La RATP réduit autant que possible les émissions de particules à la source avec le déploiement du freinage électrique sur tous les nouveaux matériels. Pour compléter cette solution, des garnitures de freinage, limitant significativement les émissions de particules fines sont en test sur le RER A". Tout en insistant sur les investissements consentis dans le cadre du "programme d'amélioration de la ventilation". Des systèmes de filtrage des particules nocives sont également en cours de test, assure la RATP.