Les Français pourront-ils tous sortir de chez eux après le 11 mai ? La question se pose après une sortie polémique mercredi du président du Conseil scientifique, Jean-François Delfraissy. Lors d'une audition au Sénat mercredi, ce dernier a en effet estimé que "18 millions de personnes", les plus à risques de développer une forme grave de Covid-19, devront rester confinées après cette date. Une éventualité qui a fait bondir de sa chaise Axel Kahn, médecin généticien et président de la Ligue contre le cancer, ce midi à l'antenne d'Europe 1 où il a estimé qu'isoler les plus fragiles était une mesure "inconstitutionnelle" et discriminatoire. Mais que dit exactement le droit ?
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Une mesure possible avec l'état d'urgence sanitaire
En temps normal, c'est-à-dire quand le droit constitutionnel classique s'applique, cette mesure paraît effectivement impossible puisqu'elle constitue une atteinte grave à la liberté fondamentale d’aller et venir et une discrimination. Mais avec le vote de l'état d'urgence sanitaire le 22 mars dernier à l'Assemblée nationale nous sommes entrés sous un régime juridique particulier. Depuis ce vote, le président et le gouvernement peuvent édicter des mesures exceptionnelles.
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Deux conditions nécessaires
Néanmoins, quoi qu'il arrive, il y a deux conditions pour limiter une liberté fondamentale : que les atteintes soient nécessaires, mais également proportionnées à l’objectif poursuivi. Deux paramètres arbitrés par un juge administratif. Pour contester une telle décision il faudra donc par exemple prouver que ce confinement rallongé pour les personnes âgées n’est pas nécessaire pour préserver leur santé. Une éventualité que des associations sont déjà en train d'étudier via un recours, d'après les informations d'Europe 1.
Un recours aurait peu de chances d'aboutir
Mais les juristes se montrent assez réservés sur les chances qu'une telle mesure aboutisse, puisque cela reviendrait pour le juge administratif à aller contre le gouvernement, dont la décision est censée être éclairée par de nombreux experts. Jusqu’à présent, ce n’est pas ce qu’on observe de la part du Conseil d’Etat, le juge administratif suprême.
Pour l'instant, ce confinement prolongé pour les personnes à risque est une simple recommandation de Jean-François Delfraissy. Il va falloir attendre deux semaines, lorsque le gouvernement va présenter son plan de déconfinement, pour savoir ce qu'Emmanuel Macron et Édouard Philippe ont tranché.