Le syndicat policier Alliance a présenté jeudi une étude alertant sur le "malaise" de l'investigation au sein de la police nationale, qui souffre, selon lui, de la multiplication des tâches annexes et de la "complexification" de la procédure.
Perte du "cœur du métier". "Il existe une forte désaffection ressentie sur tous les métiers de l'investigation, au niveau de la sécurité publique comme de la police judiciaire", a déclaré le secrétaire général du premier syndicat de gardiens de la paix et de gradés, Jean-Claude Delage, au cours d'une conférence de presse. "Nous voulons éviter cette chronique d'une mort annoncée", a affirmé Jean-Claude Delage. Se basant sur une étude réalisée par le syndicat auprès de 8.852 policiers de fin janvier à mars, via notamment Internet, Alliance épingle tour à tour, "la surcharge de tâches annexes", les problèmes d'astreinte judiciaire ou d'ordre matériel et la "complexification de la procédure". "Les policiers ne sont plus enquêteurs. Le cœur du métier, les collègues ne le vivent plus", a assuré le secrétaire général du syndicat.
"Petit judiciaire". Ainsi, l'étude syndicale affirme par exemple que "32% des sondés passent plus de 50% de leur temps à rédiger des actes administratifs et statistiques". Elle brosse le portrait d'enquêteurs estimant avoir dorénavant du mal à faire face à la charge de travail, notamment en sécurité publique, où "le sentiment d'impuissance" s'ajoute à "celui de lassitude" sur ce qu'il est convenu d'appeler le "petit judiciaire". Selon les chiffres avancés par l'étude, 81,74% des répondants en sécurité publique ont indiqué ne pas arriver à faire face à la charge de travail d'investigation. Cette proportion est quasiment inversée lorsque sont interrogés des fonctionnaires de la police judiciaire (PJ), relève cependant l'étude. Alliance se plaint également du "déséquilibre flagrant entre droit de la défense et droit de la victime" et regrette les "incidences" des derniers textes de loi.
Des propositions du syndicat. Le syndicat propose une batterie de mesures destinées à "redorer le blason de l'investigation" et "redonner aux collègues l'envie d'y aller et d'y rester", selon Jean-Claude Delage. Parmi celles-ci, la refonte des cadres d'enquête, la proscription au début de chaque PV du renouvellement des droits du gardé à vue ou la dématérialisation de la procédure. "Aujourd'hui, on demande que la durée initiale de garde à vue soit portée à 48 heures, de manière à englober toutes les contraintes des lois nouvelles. Auparavant, les enquêteurs arrivaient à faire deux voire trois ou quatre auditions pendant la première période de 24 heures. Aujourd'hui, ils n'en font plus qu'une", explique David-Olivier Reverdy, délégué Alliance, joint par Europe 1.
Le syndicat demande également un coup de pouce financier en faveur des policiers en charge de l'investigation.