Les petits Français et les maths, cela ne fait pas deux. Selon une étude internationale TIMSS réalisée dans 49 pays et publiée mardi, les élèves français de 10 ans (CM1) affichent les pires résultats de l'Union européenne en mathématiques devant Chypre. 13 % des élèves évalués obtiennent un score inférieur à la moyenne internationale, prouvant, selon l'agence des statistiques du ministère de l'Éducation, "qu'ils ne possèdent pas les connaissances élémentaires". Mais pourquoi les petits Français n'ont-ils pas la bosse des maths ? Europe 1 a tenté de résoudre l'équation.
La formation des enseignants en question. Ce qui coince, selon Sylviane Schwer, professeure des universités et directrice de l'institut de recherches en enseignement des mathématiques (Irem) Paris-Nord, c'est d'abord la formation des professeurs des écoles. "Plus de 80 % des enseignants de primaire n'ont pas fait d'études en mathématiques. Leur formation n'est pas suffisante", affirme l'universitaire. "La plupart d'entre eux viennent de licence de sciences de l'éducation, de linguistiques, d'histoire-géographie. Et le peu d'étudiants de filières scientifiques sont formés en biologie."Pour l'enseignante chercheuse, le calcul est vite fait : il manque des professeurs agrégés en mathématiques."Les professeurs des écoles n'ont pas forcément de difficultés en mathématiques mais n'ont pas forcément d'intérêt." Or, les mathématiques s'apprécient lorsqu'elles trouvent une application.
" Si les mathématiques sont trop techniques (...) cela pose des problèmes "
Une autre pédagogie. "Il faut créer les conditions pour que les élèves se posent des questions face à une situation, qu'ils puissent créer leur propre raisonnement", confirme Odette Bassis, docteur en sciences de l'éducation, présidente du groupe français d'éducation nouvelle. Elle prend un exemple : "Aujourd'hui, les enfants apprennent séparément chaque figure géométrique avec leur particularités. Cela fait autant de leçons cloisonnées. Or dans des ateliers, nous leur avons présenté une série de polygones en vrac en leur demandant de les classer sans leur donner de critères particuliers", explique-t-elle. "Cela peut paraître simpliste mais c'est fondamental. On a constaté que certains ont repéré les nombres de côtés, d'autres les angles et découvrent par eux-mêmes comment ils peuvent être triés."Michael Launay, mathématicien, interrogé mardi sur Europe 1, confirme : "Si les mathématiques sont trop techniques. Si l'on apprend des choses par cœur sans en mettre le sens forcément cela pose des problèmes. Car le but des mathématiques c'est de comprendre des choses." Pour Odette Bassis, il est donc faux de dire que les Français ne sont pas doués pour les maths. "Ce n'est pas qu'ils ne sont pas doués mais ils n'ont pas les conditions d'apprentissage adéquats".
Comprendre les concepts. L'apprentissage des maths passe aussi par l'utilisation d'un langage spécial. "Si on n'a pas pris le temps d'expliquer les concepts, comme les variables par exemple, même les bons élèves vont avoir des blocages. C'est à la maternelle et à l'école primaire qu'on intègre ces concepts là", rappelle Sylviane Schwer. Le temps passé à la discipline dans les classes grignote celui dédié à l'enseignement, pointe également la spécialiste.
Au lycée, ça change. Si les élèves de primaire français ont du mal avec les maths, il n'en est pas de même pour les lycéens en filières mathématiques ou en classe préparatoire. Selon l'étude TIMSS, ils vont jusqu'à briller en la matière. Se classant parmi les meilleurs du monde. "Ce sont des professeurs agrégés en mathématiques qui enseignent dans les spécialités ou classes préparatoires, des enseignants qui ont fait des études de mathématiques, souligne Sylviane Schwer. "Au collège, beaucoup de professeurs ont le Capes. Mais se pose un vrai problème de recrutement. Les établissements vont faire appel à des vacataires. Et dans ces cas là, les conditions de recrutement sont moins strictes. Or si on ne se donne pas les moyens d'avoir de bons professeurs, alors on ne peut pas s'attendre à grand chose. Aussi, la solution du problème tient en un mot : motivation. "Dans ces filières, les élèves ont choisi d'étudier les maths, ils ne subissent pas".