"Marcel Dassault avait ce génie de l’aéronautique et de l’intuition"

L'industriel français Marcel Dassault.
L'industriel français Marcel Dassault. © AFP
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Guillaume Perrodeau
Chez Christophe Hondelatte, Olivier Dassault, petit-fils de l'industriel, revient sur l'histoire de son grand-père, fondateur du Groupe industriel Dassault.

Derrière le groupe Dassault, aujourd'hui notamment connu pour sa branche aviation, il y avait au départ un homme : Marcel Dassault. Chez Christophe Hondelatte mercredi, Olivier Dassault, petit-fils de l'industriel mort en 1986, revient sur le parcours de son grand-père.

"Un esprit très curieux". Le déclic a lieu en 1909, Marcel Dassault (de son vrai nom Bloch) a 17 ans. Alors qu'il est élève dans une école d'électricité, le jeune Marcel voit un objet au-dessus de sa tête fendre l'air pendant qu'il est dans la cour de l'établissement. Un avion, celui du comte Charles de Lambert. Marcel Bloch est fasciné. Sa vocation naît ce jour-là. Dès lors, dès qu'il peut, il va aller à Issy-les-Moulineaux, voir voler les premiers avions. "Il a toujours été intéressé par la technologie et tout ce qui est nouveau. C’était un esprit très curieux", confie Olivier Dassault au micro d'Europe 1.

Il s'inscrit ensuite à l’École supérieure d'aéronautique et de construction mécanique (Supaéro), dont il sort diplômé en 1913, juste avant la Première Guerre mondiale, pour laquelle il est mobilisé. Mais l'armée n'a pas besoin de lui au front. Les compétences de Marcel Bloch sont nécessaires "à l'arrière", pour coordonner la fabrication d'un avion de reconnaissance, dont la construction s'établit entre quatre usines.

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La Première Guerre mondiale. Sur son temps libre, Marcel Bloch s'intéresse de près aux hélices d'avions, afin de les améliorer. Il se met en tête d'en fabriquer une en bois. Le père d'un ami, ébéniste, accepte de l'aider et l'assiste dans la fabrication de sa première hélice qu'il baptise "hélice éclair". Villacoublay lui en commande 50. En quelques mois, Marcel Bloch devient l’un des quatre fabricants d’hélices de l’époque. "Il avait ce génie de l’aéronautique et de l’intuition", souligne le petit-fils de l'industriel.

Dès lors, le jeune Marcel se sent capable de fabriquer son propre avion : un biplace de chasse. Il se lance dans la fabrication d'un prototype et banco ! L'Etat français lui en commande 1.000. Sauf que la fin de la guerre arrive et que la commande est donc annulée. Après la Première Guerre mondiale, la société renonce d'ailleurs à l'aviation. Le développement civil n'est pas du tout envisagé : on n'imagine pas transporter des gens ainsi. Un constat difficile à croire avec nos yeux d'aujourd'hui. Alors Marcel Bloch délaisse l'aéronautique, comme la plupart des constructeurs de l'époque, et s'engage dans le bâtiment. Une pause qui va durer douze ans.

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Olivier Dassault et Christophe Hondelatte ©Europe 1

"C’était un héros". En 1930, l'État français constate que ses voisins européens font tourner leurs usines d'avion à plein régime. La France est en retard sur ce plan. Alors l'État fait appel à des constructeurs, dont Marcel Bloch, à qui il commande un prototype d'avion postal moderne, puis un avion sanitaire pour transporter les blessés, ou encore un bimoteur de transport public pour Air France. En 1936, la société de Marcel Bloch est nationalisée, ses effectifs multipliés par quatre et portés à 7.000.

En 1940, un an après le début de la guerre, Marcel Bloch, juif, se retire à Cannes, où il est arrêté le 6 octobre. Les Allemands souhaitent une seule chose, que Marcel Bloch travaille pour eux. Il refuse et refusera toujours, jusqu'au bout, même à la veille de son départ pour le camp de Buchenwald, par le convoi du 17 août 1944. "C’était un héros, il s’est comporté toute sa vie en héros", fait valoir son petit-fils, "avant d’être déporté, il a eu une attitude héroïque". Dans le camp de Buchenwald, il porte le triangle rouge des prisonniers politiques et non l'étoile jaune. De santé fragile, il est pris en charge par Marcel Paul, chef du réseau communiste là-bas. C'est à lui et ses compères que Marcel Bloch doit sa survie.

À la Libération, son obstination constante de collaboration avec les Allemands le fait évidemment bien voir du gouvernement français. En 1949, il décide de changer de patronyme pour Dassault, avant de se convertir au catholicisme un an plus tard. "C'est une manière pour lui de tirer un trait sur tout ce qu'il vient de vivre", justifie Oliver Dassault. Il reprend son métier de constructeur d'avion, de "capitaine d'industrie", et développe sa société. Elle ne cessera de se développer dans les décennies qui suivent pour devenir l'un des fleurons nationaux.