La moitié des enseignants d'un lycée de Libourne (Gironde) exercent leur droit de retrait depuis lundi, après qu'une lettre anonyme, ouvertement raciste, a menacé de mort une professeure et les élèves d'origine "arabe". La lettre, retrouvée lundi dans l'établissement, vise "en la nommant" une enseignante. "L'auteur menace de 'l'égorger comme un cochon', ainsi que 'tous les bougnoules' du lycée", a expliqué vendredi à l'AFP Franck Dole, représentant CGT au lycée polyvalent Jean Monnet.
"Quand des profs décident de ne pas reprendre, ce n'est jamais par gaîté de cœur"
Depuis lundi, "des cours ne sont pas assurés. Les enseignants, très choqués, demandent la fermeture administrative de l'établissement parce qu'ils considèrent que les conditions de sécurité ne sont pas réunies", explique Charlotte Laizet, co-secrétaire départementale du Snes-FSU Gironde. La direction du lycée a porté plainte et une enquête est en cours. Le rectorat a parallèlement annoncé la mise en place de passages réguliers des forces de l'ordre aux abords de l'établissement, d'une équipe mobile de sécurité dans l'établissement et d'une cellule d'écoute. Des mesures jugées "insuffisantes" par les syndicats.
"On a dit aux enseignants 'allez, c'est bon, pas d'hystérie collective, on a fait ce qu'il fallait, vous pouvez reprendre le travail'. Mais quand des profs décident de ne pas reprendre les cours, ce n'est jamais de gaîté de cœur. Quand un prof est seul face à 35 gamins et ne sait pas s'il y en a un à l'origine des menaces, c'est terrifiant", assène la représentante du Snes-FSU. "Deux collègues ont quand même été assassinés !, ajoute-t-elle, allusion à Samuel Paty et Dominique Bernard. Les menaces contre les profs sont réelles."
Outre la sécurité du personnel éducatif, "c'est essentiellement celle des élèves eux-mêmes qui n'est pas assurée", souligne un communiqué d'enseignants du lycée. "Avec un tel appel au meurtre pour des raisons racistes (...) et en l'absence de mesures rapides, (...) nous craignons l'installation d'un climat très conflictuel, pouvant occasionner des rixes, des règlements de comptes, avec issue tragique".
Autre point de tension, l'absence de reconnaissance du droit de retrait sur la durée, le rectorat considérant désormais les enseignants comme grévistes. "C'est terrible, on fait valoir un droit pour des raisons de sécurité, pour avoir le temps de préparer le retour en classe sereinement, et on finit avec des retenues de salaires", déplore le syndicaliste Franck Dole. Les cours devraient reprendre lundi "mais les tensions, qui montent sur les réseaux sociaux entre les élèves, ne se seront pas envolées d'un coup", craint-il.