Les associations n'ont guère que ce moyen pour protester. Lundi, Emmaüs et d'autres structures similaires ont annoncé qu'elles suspendaient leurs maraudes, ces rondes sociales dans les rues de Paris destinées à nouer contact et venir en aide aux migrants installés dans la capitale. La raison de cette décision ? La recrudescence des évacuations orchestrées par les forces de police. Pour les responsables d'Emmaüs mais aussi de France Terre d'Asile, cette attitude témoigne d'une "ambiguïté" dans les "politiques publiques quant à l'accueil des migrants dans ces rues."
Demande de dialogue. Pour les travailleurs sociaux, ces expulsions ont une conséquence que déplore Pierre Henry, le directeur général de France Terre d'Asile : "Un certain nombre de migrants considèrent que nos travailleurs sociaux sont des policiers en civil. On ne peut pas donner des informations sur l'asile à une personne et une heure après la voir embarquée par la police". "Nous demandons à ce que tout le monde se remette autour d'une table et clarifie son mode d'intervention", a-t-il ajouté, en dénonçant une "logique de dissuasion".
Un changement de politique "incompréhensible". Pour ne pas laisser se reconstituer des campements dont les effectifs ont atteint des niveaux record durant l'année écoulée, la police démantèle, depuis la fin juillet, de façon quasi-quotidienne les campements installés dans le nord de Paris, au grand dam des collectifs de soutien qui déplorent une logique coercitive et vaine. Ce changement de politique est "incompréhensible" et "ne va pas du tout dans le sens de l'ouverture du centre humanitaire" prévue par la ville de Paris à la fin de l'été, estime Madame El Hassak-Marzorati, directrice générale adjointe d'Emmaüs.
Expulsions et offres d'hébergement en parallèle. De plus, même si, lors de l'opération menée le 17 août, des offres d'hébergement ont été faites à près de 700 personnes, ces évacuations sont assorties d'un contrôle de la situation administrative des migrants, à l'inverse de ce qui prévalait lorsque la préfecture de région, la ville de Paris et les associations étaient parties prenantes. Du côté de la Ville, on souligne que le retrait des associations n'est "pas une solution". Mais "on partage leur préoccupation et leur malaise sur le sujet", ajoute-t-on, en rappelant que "depuis un an et demi, la règle définie avec l'Etat était que chaque opération soit accompagnée d'une mise à l'abri et d'une offre d'hébergement. Il n'y a pas de raison objective que cette méthode ne soit plus appliquée". Depuis le 2 juin 2015, 26 évacuations conjointes ont ainsi eu lieu, avec à la clé "plus de 14.000 offres d'hébergement", selon la préfecture d'Ile-de-France.