Le Sénat a adopté mardi en première lecture, par 239 voix contre 16, un projet de loi favorisant la construction de nouveaux réacteurs nucléaires, complété de dispositions controversées, comme la suppression du plafonnement à 50% de la part du nucléaire dans le mix électrique d'ici à 2035. Un changement de cap rassurant pour Bernard Accoyer, président de Patrimoine Nucléaire et Climat (PNC-France). "On est sortis de l'utopie qui consistait à suivre l'écologie politique, qui continue à avoir pour priorité la fin du nucléaire sur la lutte contre le réchauffement climatique, ce qui évidemment n'a pas de fondement", a-t-il déclaré au micro d'Europe 1 vendredi.
Pour l'ancien président de l'Assemblée nationale, "la crise énergétique européenne et électrique française ont accéléré la prise de conscience" de l'État et entraîné l'annonce de "décisions concrètes".
La France doit se donner "un projet qui puisse rassembler les Français"
Le texte voté mardi, qui sera examiné en mars par l'Assemblée nationale, simplifie les procédures administratives afin de favoriser la construction de nouveaux réacteurs. Le président Emmanuel Macron a annoncé son intention de construire six nouveaux réacteurs, avec une option pour huit autres. Cela se fera-t-il au détriment de la sûreté nucléaire ? "La France est le pays le plus exigeant au monde sur ce plan. Les questions de sûreté ne sont pas le problème. C'est un problème de délai ainsi que de financements mais il faut surmonter ces difficultés", a tranché Bernard Accoyer avant de poursuivre.
"On le voit bien, le prix de l'énergie est à l'origine de tout. Du pouvoir d'achat des ménages mais aussi de la compétitivité du pays, de notre capacité à arrêter la désindustrialisation et à réindustrialiser le pays. C'est un projet d'ensemble. Je pense même à titre personnel, que c'est une des dernières chances que la France doit absolument saisir pour se donner un objectif, une voix, un projet qui puisse rassembler les Français."
"L'écologie politique est une idéologie"
Un projet de loi qui ne ravit évidemment pas les écologistes qui ont voté contre mardi. De leur côté, Greenpeace France et le réseau Sortir du nucléaire ont annoncé dans un communiqué commun "quitter le débat public" en cours sur de futurs réacteurs, dénonçant "une mascarade démocratique". Une résistance politique que condamne le président de Patrimoine Nucléaire et Climat. "L'écologie politique est une idéologie. Le lobby anti-nucléaire est un lobby complexe. C'est un lobby où il y a des intérêts commerciaux, où il y a des intérêts étrangers et c'est un lobby qui est très puissant, qui dispose de soutiens qui sont insoupçonnés et qu'il serait intéressant d'investiguer", a-t-il affirmé au micro d'Europe 1.
"L'intérêt de la France, c'est de s'appuyer sur ce qu'elle a su faire, ce qu'elle sait faire, parce que nous avons encore, avec les 220.000 emplois de la filière, avec tous nos scientifiques, un outil extraordinaire et c'est une chance qu'il ne faut absolument pas laisser passer."
La France, qui tire du nucléaire environ 70% de son électricité, avait décidé en 2015 la fermeture de 14 de ses 58 réacteurs, avant un revirement annoncé par le président de la République en faveur d'un nouveau nucléaire.