Le CNRS souffle ses 80 bougies. A cette occasion, Emmanuel Macron prononcera mardi soir un discours au Palais de la découverte, avant de participer à un débat sur la recherche française. Des discussions qui pourraient s’avérer houleuses. Les membres du CNRS se plaignent en effet régulièrement de leur manque de moyens. Faute de postes disponibles, ou attirés par les conditions de travail plus enviables des université étrangères, beaucoup de jeunes chercheurs quittent la France pour aller exercer ailleurs.
Un véritable "blues des chercheurs", que les plus grandes sommités de la recherche française reconnaissent. L’immense majorité des universitaires trouvent trop faibles les crédits alloués par le CNRS. Résultat : ils doivent eux-mêmes aller chercher des financements. Atant de temps qu'ils ne consacrent pas à leurs travaux. C'est ce que vit Lorena Klein, ingénieure en chimie depuis 20 ans au CNRS. En deux décennies, elle a clairement vu la situation se dégrader. "On n'a plus le temps de se dédier à ce pourquoi on est payés, ce pourquoi on a été recrutés. On passe du temps à faire des choses accessoires."
Au CNRS, les places sont chères
Le CNRS reste toutefois le plus grand organisme public français de recherche scientifique, avec 33.000 salariés, dont 30 % d'étrangers, et avec 300 recrutements chaque année. Parmi eux, des chercheurs, mais aussi des ingénieurs et des doctorants. Mais les places sont chères. Intégrer le CNRS, c’est le Graal pour les jeunes chercheurs, mais beaucoup n'ont plus d'autre choix que de quitter la France.
Comme Quentin Rodriguez qui, après sa thèse en philosophie des sciences, fera ses valises. "Quand on finit son doctorat, c'est peine perdue de chercher un poste en France. En Science politique, en histoire, on a une fuite des nouveaux docteurs à qui l’on dit de partir. J'envisage de partir en Suisse, en Allemagne, ou aux Etats-Unis."
"Il faut que la France soit vigilante"
A l'étranger, les salaires peuvent être deux à trois plus élevés, et la reconnaissance est souvent bien plus importante. "Mes collègues allemands ont sur leur carte d’identité le fait qu’ils sont docteurs ou professeur. Une thèse, c’est une valeur ajoutée pour partir dans le secteur privé ou se lancer en politique", explique Nicolas Gompel, qui vit en Allemagne depuis six ans.
Malgré tout, la France reste, dans le monde, une nation scientifique de premier plan. Depuis 80 ans, 23 prix Nobel ont ainsi été décernés à des chercheurs du CNRS, et 5.800 brevets déposés. Mais attention à ne pas brader ce savoir, recommande Antoine Petit, patron du CNRS. "Sur l’intelligence artificielle et les science de l’environnement, il y a une compétition entre les institutions internationales, pour attirer les meilleurs. Il faut que la France soit vigilante."