Dimanche s'est ouvert au Bahreïn la réunion du comité du patrimoine mondial de l'Unesco. Jusqu'au 4 juillet prochain, les représentants de 21 pays vont se pencher sur 30 candidatures mêlant sites naturels, sites culturels et sites mixtes. Si toutes sont séduisantes, toutes ne seront pas retenues. Parmi elles figurent trois dossiers français. Présentation.
La Chaîne des Puys et la faille de la Limagne
Favorite de cette course au patrimoine mondial : la chaîne des Puys et la faille de la Limagne, situées au cœur de l'Auvergne. Le site est étendu : 24.000 hectares sur une bande de 30 kilomètres de long. Sa pépite : le plateau des Dômes où trônent 80 volcans, formés entre 95.000 et 8.400 ans, dont le plus élevé, le Puy-de-Dôme s'élève à 1.465 mètres.
Le dossier n'est pas neuf. En 2014 et 2016, l'Auvergne a déjà candidaté avec deux échecs à la clef. Les irréductibles Arvernes espèrent encore pour cette édition 2018. A raison. Le 28 mai dernier, l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), une ONG dont les avis sont toujours suivis par l'Unesco, a émis un feu vert sur le dossier : "le bien proposé remplit le critère du patrimoine mondial et remplit les conditions d’intégrité et les obligations de protection et de gestion relatives au critère".
Cette année, les responsables du dossier ne s'y sont pas trompés. Alors que les années précédentes, ils avaient surtout mis en avant l'esthétisme de la célèbre chaîne de volcans, ils ont cette fois-ci insisté sur le rôle qu'elle a joué dans l'histoire des plaques tectoniques et de la formation des continents, lui donnant une valeur géologique. Un aspect qui a convaincu l'UICN. En cas de victoire, il s'agira du premier site naturel de la France hexagonal à faire son entrée dans le patrimoine mondial de l'humanité.
Les sites funéraires et mémoriels de la Première Guerre mondiale
Dans la catégorie des prétendants "culturels" figurent les sites funéraires et mémoriels du front ouest de la Première guerre mondiale. La candidature est portée par la France mais aussi la Belgique. Être retenu dans le patrimoine mondial de l'Unesco cette année serait un joli symbole puisque il y a exactement 100 ans s'achevait un des conflits les plus meurtriers du 20ème siècle, la guerre de 14-18 et ses 10 millions de morts parmi les soldats et les civils. Au total, le dossier comprend 25 sites mémoriels répartis de part et d'autres de la frontière franco-belge. Côté français, on y trouve l'ossuaire et nécropole nationale de Douaumont dans la Meuse, construit sur un ancien champ de bataille, où 16.142 soldats français sont enterrés. Côté belge figurent la porte de Menin où sont inscrits les noms de 50.000 militaires ou encore le cimetière allemand de Vladslo où 25.000 hommes ont été inhumés.
En plus de sa valeur historique et architecturale, cette candidature est aussi porteuse d'un message de paix. "Bien sûr, immédiatement après la guerre, il s'agissait principalement de lieux de deuil, de pèlerinage, pour ceux qui avaient perdu leurs êtres chers. Mais très vite, ces sites sont devenus bien plus que cela. Ce ne sont pas que des cimetières, ce sont des appels à la paix et à la réconciliation. Le slogan 'plus de guerres' leur est associé", selon Luc Vandael, chargé de projet de candidature à l'Unesco.
L'ensemble urbain historique de Nîmes
Nîmes est déjà connue pour ses arènes et sa Maison Carrée. Mais elle a un patrimoine architectural bien plus riche qu'elle veut faire connaître au reste du monde. C'est son "ensemble urbain historique", d'une étendue de 289 hectares, que la capitale du Gard a décidé de présenter au patrimoine mondial de l'Unesco. Nîmes veut notamment y démontrer que son patrimoine antique lui a donné son identité, sa personnalité mais lui a aussi permis de se distinguer par rapport à d'autres villes. Selon la candidature, Nîmes a par conséquent "une valeur universelle exceptionnelle".
Le dossier met donc en avant ses sites romains (temple de Diane, Tour Magne) mais aussi l'influence qu'ils ont eu sur toute l'histoire urbaine de Nîmes. "Conservés et réutilisés au cours des siècles, ces monuments romains ont orienté et structuré le développement urbain de Nîmes comme ils ont indéniablement, par leur proximité directe, nourri son écriture architecturale depuis le Moyen Âge", avance ainsi le site officiel de la candidature.
Malheureusement, le Gard ne part pas optimiste pour cette édition 2018 du patrimoine mondial. En mai dernier, le Conseil international des monuments et des sites (ICOMOS) a rendu un rapport très dur avec la candidature nîmoise. Selon lui, le patrimoine de la ville n'est pas si exceptionnel : il "n'a pas été montré dans les faits en quoi Nîmes se distingue comparativement des autres villes déjà inscrites sur la liste du patrimoine mondial". L'ICOMOS a aussi pointé du doigt des projets récents qui ont pu nuire au patrimoine romain, comme le musée de la Romanité, construit juste en face des arènes. Enfin, il a regretté l'absence d'un véritable plan de gestion du tourisme qui pourrait être fatal à une bonne conservation de sites vieux de 2.000 ans. Si l'Etat a finalement quand même donné son feu vert pour que la candidature parte à l'Unesco, nul doute que ces critiques ne vont pas aider Nîmes à plaider sa cause au Bahreïn.