Un été de plus en plus précoce pour les Français. L'Hexagone a connu vers la mi-juin 2022 des températures records pour la saison, avec des pointes à plus de 40 degrés dans certains endroits du pays. Cet épisode de chaleur a pu renforcer la sécheresse inquiétante des sols et les risques d'incendies. Mais comment doit-on qualifier cette montée des températures ? S'agit-il d'un pic de chaleur, d'une plume ou d'une vague ? Quand parle-t-on de "canicule" ? Europe 1 fait le point avec Jérôme Lecou, prévisionniste de Météo France.
Le pic de chaleur, une montée brutale et brève des températures
Le "pic de chaleur" est généralement "une montée brutale des températures maximales", indique le prévisionniste, "mais on peut aussi avoir un pic de chaleur nocturne". Cette montée des températures "est rapide, mais elle n'est pas durable", précise Jérôme Lecou, "donc on redescend très vite après avoir atteint des valeurs remarquables". Sur une courbe, cela se matérialise donc par un pic.
Il n'y a pas vraiment de seuil de température pour qualifier un pic de chaleur : il faut que le niveau du mercure soit remarquable par rapport à la saison. "Typiquement, en juin-juillet, des pics de chaleur sont des températures qui vont être au-delà des 35 degrés, en direction des 40", ajoute-t-il pour Europe 1.
La plume de chaleur, un phénomène fréquent
Le terme de "plume de chaleur" est relayé ces derniers temps sur les réseaux sociaux, mais il s'agit d'une expression anglo-saxonne. "Ce terme ne veut rien dire en langue française. Il faudrait utiliser le terme de 'panache' de chaleur", explique le prévisionniste de Météo France.
"C'est de l'air chaud qui est transporté et qui va se répandre à un moment donné sur le territoire en provenance d'un autre. C'est un peu comme un chalumeau, où l'on a d'un coup un panache chaud qui va sortir et se déplacer géographiquement." Ce phénomène est assez classique, souligne le météorologiste.
Le dôme de chaleur, où l'air chaud est piégé dans les basses couches
Le "dôme de chaleur" se différencie de la plume ou du panache par sa durée. "On va parler de dôme quand il y a des conditions anticycloniques avec de l'air chaud qui reste piégé dans les basses couches. La masse d'air est comprimée", expose Jérôme Lecou. "C'est comme une pompe à vélo : si vous mettez le doigt au niveau de la sortie de l'air, et que vous le comprimez, le bout de votre doigt va s'échauffer", explique-t-il.
Cet échauffement de la masse d'air arrive le plus fréquemment en été. "Quand on a un dôme de chaleur, on peut avoir une durée qui est assez longue, avec des températures qui vont s'élever progressivement au cours du temps", précise-t-il. Ce dôme de chaleur peut également être associé "à des phénomènes de pollution, puisque toutes les particules émises par l'activité humaine vont être piégées dans les basses couches", ajoute le prévisionniste.
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La vague de chaleur, un épisode de temps chaud dans la durée
L'expression "vague de chaleur" est plus technique. Elle est utilisée en ce moment par les experts de Météo France pour qualifier le phénomène climatique qui touche la France. "On calcule un indicateur thermique au niveau de la France, constitué des températures moyennes sur tout un échantillon de stations météorologiques. C'est une température moyenne nationale. Pour que l'on ait une vague de chaleur, il faut que cet indicateur soit supérieur à 25,3 degrés", indique le météorologiste.
"Il y a aussi une notion de durée", poursuit Jérôme Lecou. "Il faut que cet indicateur soit supérieur pendant trois jours à 23,4 degrés, et au moins toujours au-dessus de 22,4 degrés", précise-t-il, résumant que ce phénomène "correspond à un épisode de temps chaud, durable et qui s'inscrit avec ces critères précis pour Météo France".
La canicule, avec des températures élevées le jour et la nuit
Pour qualifier un épisode de chaleur, il existe enfin le terme de "canicule" qui se démarque de la vague de chaleur. "C'est aussi un épisode de températures élevées, mais à la fois le jour et la nuit. On a un critère de nuits chaudes aussi", renseigne Jérôme Lecou.
En France, il n'y a pas de seuil unique pour déterminer s'il s'agit d'une canicule ou non : chaque département en possède un, avec des critères précis. "On a mis au point des indicateurs biométéorologiques qui dépendent de critères qui font référence à des épisodes passés, et croisés avec des seuils de surmortalité dans les urgences en collaboration avec Santé publique France. Dans chaque département, on a défini des seuils de températures minimales et maximales au-delà desquels on s'attend à avoir de la surmortalité. Quand ils sont dépassés, on va pouvoir parler de vigilance canicule", détaille le prévisionniste de Météo France.
Par exemple, pour la région parisienne, il faut que le thermomètre monte à plus de 31 degrés le jour, et plus de 21 la nuit, pour que l'on parle de canicule.
Des seuils qui évoluent avec le réchauffement climatique
Chaque épisode de canicule intègre donc un échantillon d'épisodes précédents. "On peut faire bouger les seuils pour un département", souligne Jérôme Lecou. Si ces épisodes ne se répètent pas chaque année, rappelle-t-il, les seuils peuvent être impactés par le réchauffement climatique. "On voit bien que les 40 degrés par exemple, qui étaient tout à fait exceptionnels au début des années 2000, commencent à être observés plus fréquemment de nos jours", affirme le météorologiste.
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En conséquences, "les intensités des vagues de chaleur sont plus marquées. Et les autres effets du changement climatique, c'est la fréquence de ces épisodes qui s'accélère et la temporalité avec des épisodes qui arrivent plus tôt", énumère le prévisionniste de Météo France. Qui ajoute : "Cette semaine, la vague de chaleur devrait être la plus précoce jamais observée depuis que l'on a mis en place un indicateur thermique en 1947.
Si ces épisodes surviennent plus tôt dans la saison, ils peuvent également s'étendre plus loin, évoque Jérôme Lecou. "On peut avoir des épisodes de très fortes chaleurs ou de canicule en septembre. Finalement, on peut rencontrer ce genre d'épisodes chauds dans une période beaucoup plus large dans le climat d'aujourd'hui, et plus encore dans le climat de demain", conclut le prévisionniste.