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Benjamin Peter, édité par , modifié à
Le chauffeur, qui avait l'habitude de rouler sur le pont de Mirepoix-sur-Tarn avec des véhicules plus légers, semble avoir agi "presque spontanément", selon le procureur. Le manque de signalisation sur des itinéraires alternatifs est également pointé du doigt.
ON DÉCRYPTE

Le passage d'un véhicule trop lourd semble bien être responsable de l'effondrement du pont de Mirepoix-sur-Tarn, qui a fait deux morts lundi matin. Après inspection de la carcasse du camion, qui gît toujours au fond de la rivière, les enquêteurs ont fait les comptes : le camion, sa remorque et la foreuse qu'il transportait pesaient au total plus de 50 tonnes, alors que le franchissement était interdit aux poids lourds de plus de 19 tonnes.

"On se demande vraiment ce qui lui est passé par la tête", se demande l'ancien patron de l'entreprise de forage, joint par Europe 1. Ce dernier se dit "abasourdi". Avant de céder sa société en février dernier, il avait passé six mois à former le nouveau propriétaire, à passer en revue les ponts qu'il n'avait pas le droit de franchir, dont celui de Mirepoix. Pourtant, le chauffeur s'est engagé sur l'édifice, malgré l'interdiction, mais aussi les coups de klaxon et les appels de phare de son employé qui le suivait. Pour le procureur Dominique Alzeari, il aurait agi machinalement.

"C'était quelqu’un qui était connu pour être rigoureux"

"Le chauffeur et gérant de la SARL empruntait très couramment cette voie de circulation et ce pont suspendu avec des véhicules légers, des camionnettes, voire avec des camions de moindre tonnage. Ce jour-là, il s'est dirigé, j'allais dire presque spontanément, sur son itinéraire, alors que c'était quelqu’un qui était connu pour être rigoureux et pour repérer ses itinéraires", avance le procureur. "C'est au moment où le véhicule était sur le pont qu'il a provoqué certainement l'effondrement, immédiat et total, du pont", poursuit-il.

Mais le procureur se veut tout de même prudent. Des investigations doivent encore être menées pour déterminer si la structure même du pont n'est pas en cause, et si la surcharge seule a provoqué l'effondrement.

Aucun panneau proposant des itinéraires alternatifs 

Des voix s'élèvent en outre pour dénoncer un défaut de signalisation à destination des poids lourds. "Le panneau bleu qui indique habituellement l'itinéraire à suivre pour les poids lourds, il n'est jamais indiqué. Si c'est un chauffeur du coin, ça va, mais s'il ne connaît pas et que le GPS indique d'aller tout droit, comment sait-il ?", s'interroge sur Europe 1 un chauffeur poids lourds de la région.

Comme l'ont constaté nos reporters, s'il y a bien en effet trois panneaux qui indiquent que le pont est interdit aux véhicules de plus de 19 tonnes, aucun n'indique d'itinéraires alternatifs, sur cette route où le passage de camions est rare. 

Reste qu'un itinéraire doit se préparer longtemps en amont, et que le chauffeur a une part de responsabilité, même s'il a été induit en erreur par son GPS. Pour Louis-Michel Barraud, de la Fédération nationale des transporteurs de Normandie, interrogé par Europe 1, les GPS abrutissent les chauffeurs. "Il m'est arrivé de demander à un chauffeur pourquoi il avait pris un itinéraire précis, et il m'a répondu : 'C'est pas moi, c'est le GPS qui m'a fait passer par là.' C'est stupide, l'homme est très important dans ce métier", tonne-t-il.

Selon lui, il faut absolument former, et surtout sensibiliser, les jeunes routiers à la technologie la plus fiable du métier : la carte routière, et toutes les informations sur les ponts qu'elle nous indique.