Si les Français ne consommaient que du poisson pêché localement depuis le 1er janvier, on n’en trouverait plus nulle part à partir… du 2 mai ! Cette journée de la "dépendance au poisson", calculée par l’ONG Aquaculture Stewardship Council, tombe chaque année de plus en plus tôt - elle arrivait onze jours plus tard, il y a dix ans. Elle illustre notre dépendance à l’égard des importations en matière de produits de la mer. Malgré le fait que l’Hexagone soit bordé de côtes, les deux tiers des poissons que nous consommons sont d’origine étrangère. Cela est notamment dû au fait que saumons, thons, crevettes sont de plus en plus appréciés par les Français.
>> LIRE AUSSI - Pêche post-Brexit : les Britanniques accordent 23 licences supplémentaires aux pêcheurs français
C’est en tout cas ce qu’explique Stéphan Beaucher, consultant en politiques publiques de gestion des pêches. "Le saumon fumé est devenu un produit très à la mode, il s'est énormément démocratisé sur ces quatre dernières décennies", étaye-t-il. "Il y a un engouement au niveau des besoins en protéines non grasses et d’oméga 3, plébiscités par la presse féminine et les régimes minceurs", poursuit Stéphan Beaucher.
"Nous consommons donc, aujourd’hui, 34 kilos de produits de la mer par tête. Or, la France est un petit pays producteur. On ne produit que le quart de ça. Donc la demande s'accroît sur un marché qui est déjà en déséquilibre", alerte-t-il.
La France, petit pays producteur de poissons
Ces espèces "à la mode" sont issues d’élevages en aquaculture, un secteur dans lequel la France n’est pas performante, pour des questions de partage d’espaces littoraux. Mais pour le reste des poissons, le pays est également à la traîne, pour des raisons climatiques et de gestion des stocks. "Le Danemark et le Royaume-Uni sont des pays où les eaux sont froides", avance Stéphan Beaucher. "Et plus les eaux froides, plus elles sont poissonneuses."
"D’autre part, il se trouve que les deux pays au monde qui gèrent mieux leurs stocks de cabillaud, sont l'Islande et la Norvège", enchaîne-t-il en prenant pour exemple l’un des poissons sauvages les plus consommés. "Or, ces pays-là gèrent depuis le XIXᵉ siècle leurs stocks de cabillaud. En France en revanche, c'est très, très récent. C'est apparu avec la politique commune des pêches, il y a trente ans", résume le consultant.
Le poisson local est certes à privilégier, étant donné que sa pêche est souvent plus respectueuse de l’environnement, car les émissions de CO2, liées à son transport, sont réduites. Mais, étrangers ou pas, les produits de la mer sont à consommer avec modération. Leurs stocks sont en effet limités et il ne faut pas en abuser pour laisser les écosystèmes se régénérer naturellement.