Plusieurs voix se sont élevées ces derniers mois pour dénoncer le traitement réservé aux enfants pris en charge par l'Aide sociale à l'Enfance (ASE, qui a succédé à la Ddass). Parmi elles, celle de Perrine Goulet, députée LREM de la Nièvre, qui a créé une mission parlementaire sur l'ASE. Cette ancienne enfant de la Ddass est revenue sur l'abandon de ces enfants par les départements, au micro de Nikos Aliagas jeudi.
Un système qui dysfonctionne
Un SDF sur quatre est un ancien enfant placé par l'Aide sociale à l'Enfance (ASE, qui a succédé à la Ddass), selon un rapport du Cese de 2018 et 70% des jeunes placés n'ont aucun diplôme lorsqu'ils sortent du système. Pour Perrine Goulet, c'est le signe d'un système qui dysfonctionne. "Tout au long de leur parcours, même lorsque ces enfants sont dans les foyers, cela ne fonctionne pas", déplore-t-elle au micro de Nikos Aliagas. "Aujourd'hui, on a encore un enfant [de l'ASE] violé toutes les heures. Donc la détection des maltraitances débute mal." La députée rappelle par ailleurs que "seulement 5% d'une classe d'âge [d'enfants de l'ASE] vont au lycée alors que c'est 49% de la population."
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Elle pointe du doigt un manque de moyens de la part des départements qui sont en charge de la protection de l'enfance mais également un problème de contrôle des infrastructures. "Des éducateurs sont en difficulté. Ils ne sont parfois pas assez nombreux et pas accompagnés", regrette-t-elle.
Des enfants puis des jeunes abandonnés
Une situation amène à de "nouveaux abandons". "On les pousse à sortir du système mais on ne les prépare pas à être autonomes. On ne les accompagne pas. Qui laisserait son enfant à la rue à 18 ans en lui disant de se débrouiller ? En tant que parents, ce n'est pas possible et pourtant, c'est ce que font les départements", déplore Perrine Goulet.
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La rapporteure de la commission déplore notamment que le "contrat jeune majeur" - qui oblige les départements à accompagner les jeunes issus de l'ASE jusqu'à leurs 21 ans - ne se poursuive pas jusqu'à leur insertion professionnelle. Aujourd'hui, ces jeunes sont poussés à faire des études courtes. "Les départements doivent penser qu'investir dans la protection de l'enfance, c'est gagner ensuite en insertion. Ces enfants ne sont pas électeurs et ce n'est pas une priorité de les regarder. C'est honteux."
"On n'oublie pas les violences vécues dans un foyer"
Face au constat que rien n'avait changé depuis sa propre enfance, Perrine Goulet a décidé de raconter son parcours. Confiée à l'ASE à neuf ans avec son frère cadet après le décès de leur mère, elle a aussi vécu en foyer. "J'ai estimé qu'il fallait prendre la parole parce qu'on ne peut pas continuer à avoir autant d'enfants cassés dans notre pays. J'ai eu la chance d'être récupérée par les parents de mon ex-mari à 18 ans", confie-t-elle. "Sinon, je pense que je serais peut-être à la rue, comme beaucoup. J'ai eu cette chance et parfois ça se joue à pas grand chose."
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La députée de 41 ans précise néanmoins que cela n'a pas été sans difficulté. "On n'oublie pas les violences vécues dans un foyer. Ça nous construit mais ça nous pénalise ; j'ai une hypersensibilité accrue", décrit-elle. "C'est très important qu'on regarde les choses en face".