Le rebondissement est aussi improbable que porteur d'espoir. Lundi, Nordahl Lelandais, suspecté d'avoir enlevé et tué Maëlys, neuf ans, fin août en Isère, a été placé en garde à vue dans un tout autre dossier, celui de la disparition du militaire Arthur Noyer. Les proches de cet homme, qui n'a pas donné signe de vie depuis le mois d'avril dernier, n'ont jamais cru à l'hypothèse d'un départ volontaire. Mais l'enquête ouverte par le parquet de Chambéry pour "enlèvement et séquestration sans libération" au printemps n'avait jusque-là pas permis de répondre aux questions de la famille. "La juge d'instruction nous avait reçus il y a quelques mois. Elle nous avait expliqué que c'était pour le bien de l'enquête si on ne nous disait rien", a confié la mère du soldat au Dauphiné Libéré.
Du stop dans le centre de Chambéry. Arthur Noyer, 24 ans, est caporal du 13ème bataillon de chasseurs alpins (BCA) de Chambéry, en Savoie. Mardi 11 avril 2017, le jeune homme "qui aime faire la fête avec ses amis" passe la soirée dans une boîte de nuit du centre-ville de Chambéry, dans le quartier du Carré Curial. Dans la discothèque, il réalise que son téléphone a disparu. "L'avait-il prêté sans qu'on lui rende ? Quelqu'un lui avait-il volé ? Toujours est-il que la police nationale est intervenue et que le téléphone a été restitué au caporal", écrit à l'époque Le Dauphiné Libéré.
Vers 4 heures du matin, Arthur Noyer quitte la discothèque, seul. "Comme il était de garde le lendemain, il a dû vouloir rentrer plus tôt. Et comme ils étaient venus avec la voiture de son collègue, il a dû vouloir rentrer en stop", avançait son père, interrogé par la même source quelques semaines plus tard. Une caméra de surveillance a bien filmé le jeune homme faisant du stop rue de la République, à quelques kilomètres de sa caserne. "Il marchait le long de la route et n'avait plus de veste", a témoigné un commerçant du secteur.
"Notre fils était heureux". Peu habitué à être en retard selon son entourage, Arthur Noyer ne se présente pas au rapport, le lendemain matin à 8 heures. Ses parents, qui vivent à Bourges, font immédiatement le déplacement pour distribuer des avis de recherche. Le signalement du jeune homme, cheveux courts, yeux noisettes, jean beige et t-shirt blanc, est placardé aux quatre coins de Chambéry, en vain.
"Notre fils était heureux et épanoui au sein de son bataillon. Notre famille est soudée, ne connaît pas de problème particulier et Arthur est très complice avec son jeune frère, qui a deux ans de moins que lui. S'il y avait eu quelque chose, on l'aurait senti…", déplore alors le père du caporal dans les médias. "C'était une soirée normale, comme on en vit souvent : on sort boire un verre en ville, puis on rentre", abondent ses collègues de travail.
Des recherches vaines. Depuis, l'enquête progresse discrètement. Elle a notamment établi que le téléphone d'Arthur Noyer s'est éteint vers 5 heures du matin. L'important dispositif de recherches mis en place dans les jours suivant la disparition du militaire est lui resté vain. Selon l'Express, les enquêteurs ont notamment sondé les plans d'eau voisins, comme dans l'affaire Maëlys. Fin juillet, une importante opération de gendarmerie a notamment été menée près du lycée Monge de Chambéry.
Le rapprochement entre les deux affaires s'est fait "il y a quelques semaines", a confié une source proche de l'enquête en cours sur l'enlèvement et le meurtre de l'enfant. Magistrats et gendarmes grenoblois travaillaient, parmi les pistes, "à déterminer s'il y avait un lien entre la disparition de la fillette et d'autres disparitions à proximité".
Plusieurs éléments matériels. La garde à vue de Nordahl Lelandais, qui fut lui aussi militaire, permettra-t-elle de donner un coup d'accélérateur aux investigations ? Selon les informations recoupées par Europe 1, le téléphone du meurtrier présumé de Maëlys a "borné" au même endroit que celui d'Arthur Noyer le soir de sa disparition. L'exploitation de son matériel informatique a en outre révélé qu'il avait fait des recherches sur la manière de faire disparaître un corps, "postérieures à la disparition" du caporal.
De plus, "il n'est pas impossible" que l'Audi noire de Nordahl Lelandais figure parmi les véhicules apparus dans l'enquête sur l'affaire Noyer. Jusqu'à présent, ils étaient en "masse trop importante" pour avoir été exploités fructueusement.
Mardi, le parquet a annoncé le prolongement de la garde à vue du suspect, au domicile duquel de nouvelles perquisitions ont été effectuées. Reste à savoir ce que les enquêteurs obtiendront de l'homme, qui a toujours nié toute implication dans la disparition de Maëlys, malgré un faisceau d'indices concordants.