Qui était Madame Claude, la reine de la prostitution ?

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Madame Claude, qui voulait "rendre le vice joli", a été à la tête d'un des plus grands réseaux de proxénétisme de France.

Pour elle, il y avait deux moyens de réussir dans la vie : "la bouffe et le sexe". Mauvaise cuisinière, il lui restait la deuxième voie. A la tête d'un des plus grands réseaux de prostituées en France dans les années 1960-1970, Madame Claude est morte samedi à Nice à l'âge de 92 ans. Avec elle, disparaît le parfum sulfureux dégagé par ses call girls, comme elle aimait les appeler. Résumé d'une vie romanesque.

De la rue aux grands de ce monde. Madame Claude, Fernande Grudet de son vrai nom, est née en Anjou en juillet 1923. Élevée chez les soeurs puis devenue fille-mère, elle s'installe dans la capitale. Cette Parisienne d'adoption s'y prostitue et devient alors "Claude". Le "Madame" vient s'y accoler lorsqu’à la fin des années 1950, elle monte un réseau de prostitution dans un hôtel particulier très chic du 16e arrondissement où elle veut "rendre le vice joli". Pour elle, monnayer des charmes à des hommes riches doit se faire "sans équivoque" et "sans laideur". Quitte à payer de la chirurgie esthétique aux filles qui en avaient besoin.

La légende "Madame Claude". Sa renommée prend son envol. D'une modeste entreprise, la maison devient un lieu mondialement connu. "Évoquez le nom de Madame Claude devant un Américain d'une cinquantaine d'années, il saura immédiatement de qui il s'agit", rapporte Le Figaro. A raison. Le nom est devenu un mythe outre-Atlantique. Au point que Fernande Grudet fera estampiller ce pseudo en marque, pour éviter les abus qu'il a pu provoquer. Comme l'ouverture à Berlin d'un bar du même nom qui prétendait reproduire l'ambiance de la prostitution parisienne des 30 Glorieuses.

JFK et le Shah d'Iran. Des hommes politiques français ou étrangers, des artistes, des avocats, des hommes d'affaires… la "haute" se presse chez Madame Claude pour y fréquenter ses "call girls". Dans ses souvenirs publiés, elle a évoqué le Shah d'Iran, le président américain John Kennedy ou encore Giovanni Agnelli, industriel italien, patron du groupe Fiat. Une proxénète indispensable à la République, au vu de son carnet d'adresses. Les confidences glanées par ses prostituées étaient en effet transmises aux services secrets de l'Hexagone, de quoi avoir pignon sur rue sans être inquiétée, à une époque où le proxénétisme était interdit.

Le fisc aux trousses. Lorsque Valéry Giscard d'Estaing arrive au pouvoir en 1974, une page se tourne. En 1976, poursuivie pour son activité illégale, Madame Claude est condamnée à verser au fisc 11 millions de francs. Elle prend alors la poudre d'escampette, direction Los Angeles aux Etats-Unis. La suite ne sera qu'enchaînements de déboires. Revenue en 1985 en France, pensant bénéficier d'une prescription fiscale, elle atterrit à la prison de Cahors pour y purger une peine de quatre mois.

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A sa sortie, celle qui assume son titre de "mère maquerelle"  tente de se relancer. Peine perdue comme elle l'a expliqué au Point : "je n'ai exercé que quelques mois, à une très petite échelle, mais probablement mon passé et mon nom m'ont desservie. J'ai très vite été incarcérée". Condamnée cette fois-ci à trois ans de prison, dont un an ferme, elle est aussi ruinée à cause d'une amende d'un million de francs. Interviews grassement monnayées, livres… ses souvenirs, qui valent de l'or, remboursent alors le fisc. Madame Claude s'installe ensuite à Nice où elle vit d'une modeste retraite.

Fille de bourgeois, puis... fille d'ouvrier. Sa légende, alors, est à son apogée. Et elle ne tient pas qu'aux prestigieux clients qui ont défilé dans son hôtel particulier. A travers ses livres, Fernande Gruet a en effet réécrit sa vie, celle d'une bourgeoise austère de province. Dans ses autobiographies, elle est fille de notable, a trois frères élevés chez les Jésuites et a été déportée pendant la guerre. Mais selon une enquête d'"Un jour, un destin" diffusée en 2010 sur France 2, il est surtout avéré que Madame Claude, en réalité fille d'ouvrier, a une imagination fertile.