Comme tant d'autres femmes qui seront rassemblées place de la République à Paris, samedi après-midi, elle veut dénoncer l'inertie des pouvoirs publics face au fléau des féminicides. Aide-soignante et porte-parole du Collectif des proches et familles de féminicides, Céline Lolivret s'y allongera sur le sol en mémoire de son amie d'enfance, morte sous les coups de son compagnon. "La police n'a pas su la protéger, comme la justice", témoigne-t-elle sur Europe 1, appelant à des mesures concrètes et rapides du gouvernement, alors que le collectif a décompté 74 femmes tuées depuis le début de l'année 2019 par leur conjoint ou ex-conjoint.
Lors du rassemblement prévu à 17 heures par son collectif, Céline Lolivret "incarnera" Julie, son amie d'enfance. Une jeune femme "pétillante", assassinée par balles le 3 mars 2019 dans son appartement en Corse. Selon le témoignage de la militante, Julie, qui avait deux enfants, avaient porté plainte six fois, sans succès, et avaient tenté une dernière fois d'alerter les gendarmes à la veille du drame, sur le port d'arme de son compagnon. "On lui a répondu : 'tant qu'il ne vous tue pas, on ne peut pas lui retirer son arme'", raconte Céline Lolivret.
"La police n'a pas su la protéger, comme la justice", dénonce-t-elle encore. Une mauvaise prise en charge dans les commissariats que Céline Lolivret a elle-même vécu. Battue pendant cinq ans par son compagnon, elle s'était décidée à aller déposer plainte. Mais la première fois, "on m'a dit que c'était ni le jour ni l'heure pour porter plainte". Avant de s'entendre dire, lors de son retour le lendemain : "on ne peut pas prendre votre plainte, ça sera une main courante".
"Il faut que le gouvernement réagisse"
"Très révoltée" par les chiffres des meurtres depuis le début de l'année, l'aide-soignante réclame donc des mesures d'urgence. "Il faut que le gouvernement réagisse, ce n'est pas possible ces chiffres", alerte-t-elle. "On ne peut pas monter à 140 femmes tuées à la fin de l'année". "Il faut que systématiquement quand une femme vienne dans un commissariat, qu'elle porte plainte, et pas une main courante", car en cas de main courante, "ça ne remonte pas au niveau du procureur". Et de réclamer également "une ordonnance d'éloignement et de protection pour ces femmes et ces enfants". Car trop souvent, selon elle, les mesures adoptées sont inadaptées. "C'est au concubin de quitter l'hébergement et non à la femme d'aller dans un foyer".
Longtemps battue, Cécile Lolivret ne s'est décidée que très récemment à témoigner à visage découvert. "C'était important pour la mémoire de mon amie", explique-t-elle, confiant son envie d'avoir "cette force pour toutes les femmes qui n'ont pas pu s'exprimer".