Halte au gaspillage ! Le Premier ministre Édouard Philippe et la secrétaire d'État à la Transition écologique Brune Poirson ont dévoilé lundi en Mayenne les grands axes de la feuille de route de l’économie circulaire. Au total, ce sont 50 mesures qui visent à rendre l’économie plus durable et réduire le gaspillage à tous les étages : production, consommation et recyclage. Le gouvernement souhaite particulièrement améliorer la gestion des déchets, avec de nombreux changements à prévoir pour les consommateurs.
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Objectif 100% de déchets recyclés. L’exécutif est parti d’un constat : la France est à la traîne en matière de recyclage des déchets. "Le système actuel a permis d’atteindre une collecte de 55 % des bouteilles plastique et l’extension de la collecte de tous les plastiques dans les ‘bacs jaunes’ qui a été engagée récemment devrait permettre d’atteindre au mieux 70 % à l’échelle nationale", souligne le document. Insuffisant pour le gouvernement qui affiche désormais un objectif de collecte de 100% des déchets recyclables, sans toutefois avancer d’échéance.
Expérimentation a minima de la consigne
Pour y parvenir, la feuille de route de l’économie circulaire dégage plusieurs pistes, notamment simplifier et harmoniser les règles de tri, ou encore mettre en place un système de consigne sur certains emballages, comme les bouteilles plastiques, les canettes et les piles, afin d'améliorer leur collecte et leur taux de recyclage. Ce retour de la consigne, déjà annoncé en février par Brune Poirson, est finalement moins ambitieux que prévu : le gouvernement va proposer l’expérimentation du système en Outre-mer uniquement.
A côté, des dispositifs de "consigne solidaire" seront mis en place dans les communes volontaires. Concrètement, "chaque nouvelle bouteille et canette collectée contribuerait au financement d’une grande cause environnementale, de santé ou de solidarité". Pas d’échange contre une petite somme d’argent donc (quelques centimes selon le contenant), contrairement à ce qu’avait laissé entendre la secrétaire d’État initialement. La consigne marchande "est l'objectif", mais le gouvernement "ne peut pas imposer comme ça un système qui va changer les habitudes non seulement des collectivités locales, mais aussi des entreprises, et des Français, comme ça du jour au lendemain sur un claquement de doigts", a défendu Brune Poirson sur RMC mardi.
Inciter les Français à recycler plus
Faute d’aller jusqu’au bout sur le système de consigne, le gouvernement a donc axé son plan sur le recyclage. En plus des mesures qui concernent les entreprises, les collectivités et les collecteurs (meilleure prise en charge des déchets, incitations financières et réduction des contraintes), les citoyens sont en première ligne du combat contre le gaspillage. L’exécutif le reconnaît, il faut "rendre le tri des déchets beaucoup plus simple pour les Français".
Information plus claire. La feuille de route promeut donc plusieurs idées pour inciter les ménages à recycler plus et mieux. Premier point : "simplifier et harmoniser les règles de tri des déchets sur tout le territoire", à commencer par une harmonisation des couleurs des contenants d’ici 2022 (vert pour le verre, jaune pour le plastique, bleu pour le papier, trio qui varie parfois selon les régions). Le gouvernement va également demander aux éco-organismes qui collectent et recyclent les déchets d’établir une carte nationale en accès libre des points de collecte.
Autre changement de taille, sur les emballages cette fois : la signification du pictogramme "Triman" sera clarifiée (nature du tri) et son apposition sera obligatoire dès 2021 sur les emballages concernés. A l’inverse, le "point vert" sera progressivement interdit car il "entraîne une confusion" dans l’esprit des consommateurs. En effet, contrairement à l’idée répandue, ce petit logo ne désigne pas un emballage recyclable, il signifie simplement que l’entreprise qui vend le produit participe financièrement à la collecte et au tri.
Enfin, et c’est sans doute ce qui pourrait le plus bouleverser les habitudes des Français : la feuille de route prévoit de "sortir les biodéchets des poubelles". Selon le gouvernement, il y aurait dans nos poubelles 22 millions de tonnes de déchets alimentaires et de déchets verts pouvant être valorisées. A l’avenir, chacun sera donc incité à faire un geste de tri supplémentaire (ce que font déjà les gens qui ont installé un compost) en séparant les restes de cuisine ou de jardinage du reste des détritus. L’État souhaite à l’avenir organiser le tri et la collecte à la source des biodéchets par les collectivités, d’abord dans la restauration collective puis chez les particuliers dans un deuxième temps.
Favoriser le réemploi et la réparation
Les mesures en faveur du recyclage satisfont globalement les ONG environnementales qui les réclamaient depuis longtemps. Mais "il faut faire en sorte que l'économie circulaire ne soit pas simplement cantonnée au recyclage", a précisé Patrick Hervier, référent économie circulaire de France Nature Environnement, soulignant que le tri reste aujourd'hui "la forme la plus visible" de l'économie circulaire.
Avant d'avoir recours au recyclage qui capte, selon lui, une grande partie des soutiens financiers, le monde associatif milite ainsi pour privilégier le réemploi et la réparation. Deux secteurs que la feuille de route gouvernementale prévoit aussi de booster, notamment par le biais de plateformes numériques de mise en relation des réparateurs avec les consommateurs, ainsi que des mesures fiscales "pour permettre une baisse effective des prix des services de réparation". Des taux de réemploi et de réparation, encore à fixer, seront imposés aux producteurs.