Des peines de jusqu'à 12 mois de prison ferme ont été requises mardi devant le tribunal correctionnel de Roanne contre trois personnes accusées d'avoir passé à tabac en octobre dernier un mineur soupçonné d'avoir agressé sexuellement la fille de l'un d'eux, âgée de 6 ans. Dans une salle d'audience comble, le procureur de Roanne Abdelkrim Grini a requis une condamnation à 18 mois de prison dont 6 à 9 mois de sursis probatoire contre le père de la fillette, qui a expliqué à la barre avoir "pété un câble", sous "le coup de l'émotion", lorsqu'il s'en est pris au jeune homme de 16 ans.
Une sorte de "lynchage" à 3 heures du matin
Le représentant du parquet a indiqué que les quatre hommes - le père de la fillette et trois voisins - avaient organisé le 22 octobre dernier vers 3 heures du matin une sorte de "lynchage", rouant de coups l'adolescent à l'aide d'un bâton et d'un câble électrique. L'affaire avait alors fait réagir au sein du gouvernement et dans les médias, nourrissant des débats sur le droit à se faire justice soi-même. Le procureur a également requis une peine d'un an de prison, dont six mois avec sursis, pour un voisin, et deux ans de prison, dont un avec sursis, pour un autre en état de récidive. Une "relaxe au bénéfice du doute" a été requise pour le quatrième.
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Le père de la fillette, chauffeur-livreur de 28 ans, est le seul à avoir reconnu les violences. Le procureur lui reproche d'avoir revêtu l'habit de justicier. "On n'est pas dans le cadre de la légitime défense, avec une riposte conditionnée par le caractère immédiat et proportionnée à l'agression subie par l'enfant de ce monsieur", a-t-il souligné. "Si ça s'était passé à votre domicile j'aurais applaudi et j'aurais même accepté une violence appuyée sur le moment", a toutefois concédé le procureur, tout en tançant le prévenu pour avoir "effectué des contrôles d'identité et interpellé des personnes pour les photographier dans les rues de Roanne".
Le père de la fillette "ne s'est plus maîtrisé"
"Cette intervention pour appréhender le jeune homme était salutaire. Le degré de violence de mon client est certes illégitime, il le reconnaît. Mais il était sous une pression insupportable avec un sentiment d'abandon et il ne s'est plus maitrisé", a plaidé de son côté Me Anne-Laure Lebert, conseil du père de famille. "Si on était dans le cadre d'un lynchage, les blessures qu'il a infligées seraient d'une gravité autre", a-t-elle ajouté, estimant que la prison ferme requise contre son client est "injustifiée dans le cadre d'une justice humaine".
En détention provisoire après sa mise en examen pour agression sexuelle, l'adolescent n'a pas assisté au procès pour des raisons de sécurité. Ce dernier nie toute agression, alors que la mère de la fillette assure avoir surpris chez elle, dans la nuit du jeudi 20 au vendredi 21, un jeune homme correspondant à son signalement. Un voisin l'a également reconnu alors qu'il marchait dans le voisinage cette nuit-là. Le jugement a été mis en délibéré au 7 mars.