Strasbourg : les restes des victimes d’un médecin nazi découverts

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Le camp de concentration alsacien de Natzweiler-Struthof. © AFP
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C.P.-R. avec AFP , modifié à
Les chercheurs niaient jusqu'alors leur présence. Pourtant, des restes de victimes du nazisme ont été retrouvés à l'institut de médecine légale de Strasbourg.

Des restes de victimes de l'anatomiste nazi August Hirt, conservés dans un bocal et des éprouvettes et dont les chercheurs écartaient jusqu'ici l'existence, ont été découverts récemment à l'institut de médecine légale de Strasbourg, a annoncé samedi la municipalité dans un communiqué. 

C’est l'historien Raphaël Toledano, auteur de plusieurs travaux sur la question, qui a fait cette découverte inattendue le 9 juillet dernier. Le spécialiste a notamment travaillé sur Le nom des 86, un documentaire réalisé par Emmanuel Heyd. Le chercheur est parvenu à identifier plusieurs pièces avec le concours du directeur actuel de l'Institut de médecine légale de Strasbourg, le Pr Jean-Sébastien Raul. Parmi celles-ci, "un bocal contenant des fragments de peau d'une victime de chambre à gaz", a-t-on précisé.

Une découverte "presque par hasard". C'est en allant vérifier par lui-même à la fac de médecine les allégations d'un ancien professeur que Raphaël Toledano est tombé "presque par hasard" sur ces bocaux. "Cela a été un choc de découvrir ces restes : comme tout le monde, je pensais qu'ils étaient enterrés depuis des années", a-t-il expliqué lundi sur Europe 1.


Restes de victimes du nazisme à Strasbourg...par Europe1fr

Ces restes appartiennent aux 86 victimes du projet d'une "collection de squelettes juifs". Raphaël Toledano a également découvert "deux éprouvettes renfermant le contenu de l'intestin et de l'estomac d'une victime et un galet matricule utilisé lors de l'incinération des corps" au camp de concentration alsacien de Natzweiler-Struthof. Ces restes appartiennent à plusieurs des 86 victimes d'un projet de "collection de squelettes juifs" voulu par August Hirt. La majeure partie des restes, en grande partie découpés, avait été retrouvée par les alliés peu après la libération de Strasbourg en 1944, et fut rapidement inhumée dans un cimetière juif. Les pièces retrouvées à présent sont des éléments qui avaient été conservés par un professeur de médecine légale de la Faculté de médecine de Strasbourg, Camille Simonin, dans le cadre de l'enquête sur les crimes du docteur Hirt.

Ce professeur avait été chargé par les autorités militaires d'effectuer des autopsies judiciaires pour "établir les conditions ayant conduit à la mise à mort délibérée" des victimes. Dans ses recherches, le chercheur Raphaël Toledano a été aiguillé par une lettre de Simonin datant de 1952. Le courrier de ce professeur faisait notamment "mention de bocaux contenant des prélèvements effectués au cours des autopsies judiciaires réalisées sur les victimes juives de la chambre à gaz du Struthof". "Les étiquettes identifient chaque pièce avec précision et font notamment état du matricule 107969, qui correspond au numéro qui fut tatoué au Camp d'Auschwitz sur l'avant-bras de Menachem Taffel, une des 86 victimes [...] comme cela est confirmé par les archives du Camp d'Auschwitz", a-t-on ajouté.

Des restes rendus à la communauté juive strasbourgeoise. La municipalité entend remettre les pièces découvertes à la communauté juive de Strasbourg. Elles feront l'objet d'une inhumation et doivent rejoindre les restes des victimes enterrés au cimetière israélite de Cronenbourg à l'ouest de la métropole alsacienne, a précisé la municipalité.

Une existence déjà signalée par Michel Cymes. La polémique autour de l'existence, longtemps mise en doute, de restes de victimes du nazisme à l'institut de médecine légale de Strasbourg avait été relancée en janvier après la publication d'un livre du médecin et chroniqueur de télévision Michel Cymes, consacré aux médecins des camps de concentration. Dans cet ouvrage, Michel Cymès avait cité des témoignages selon lesquels des coupes anatomiques des 86 victimes, réalisées à l'époque nazie, était toujours conservées à l'institut. En réaction à cette publication, des chercheurs, l'Université de Strasbourg et l'institut de médecine légale avaient alors catégoriquement démenti l'existence de ces restes non inhumés de victimes.