C’est l’un des gros dossiers au menu du 12ème congrès de la médecine générale, qui se déroule de jeudi à samedi à Paris. La télémédecine serait-elle la solution d’avenir de la médecine en France ? Le sujet est un serpent de mer, mais le gouvernement compte bien développer la pratique, notamment pour lutter contre les déserts médicaux. De nombreuses questions se posent, notamment sur le déroulé même des consultations. Car le grand changement, c’est que le praticien n’aura plus en face de lui son patient. Il ne pourra donc pas effectuer la traditionnelle auscultation, passage quasi obligé lors d’une visite chez le médecin.
Première phase : "On pose plus de questions". Du coup, la place donnée à l’échange est prépondérante. "En télémédecine, il manque l’examen clinique. Il faut donc hypertrophier toute la partie interrogatoire. On pose donc plus de questions", explique à Europe1.fr Marion Lagneau, directrice médicale de MédecinDirect, une plateforme qui opère de la télémédecine en lien avec des mutuelles. "Mais plusieurs études montrent que 80% des diagnostics peuvent être posés après un simple interrogatoire", assure cette gastro-entérologue.
Deuxième phase : "Le support visuel est très important". Des questions, donc, beaucoup de questions sont posées lors d’une téléconsultation. Mais pas seulement. "Il y a aussi le support visuel, qui est très important. On demande aux patients de nous montrer leur gorge, leur plaie ou leurs boutons", poursuit le docteur Lagneau. Quand l’entretien est téléphonique et ne s’effectue pas par visioconférence, les patients sont donc priés d’envoyer des photos par mail.
" Il y a la même peur de passer à côté de quelque chose en médecine présentielle qu’en télémédecine "
Troisième phase : "Il faut être très humble en télémédecine". Vient ensuite l’heure du diagnostic. "Tout ce processus peut largement suffire pour des petites pathologies", assure le médecin. Et pour les ordonnances ? On les rédige sur nos logiciels médicaux, et ensuite on les envoie en pièce jointe", sur l'interface sécurisée du patient, précise Marion Lagneau. Certains médicaments restent soumis à une visite physique chez un médecin pour être autorisés. Idem pour les arrêts de travail et les certificats médicaux d’aptitude à une pratique sportive.
Quatrième phase : une orientation, éventuellement. En revanche, quand les choses apparaissent plus graves, le praticien ne doit pas hésiter à orienter les patientes. "Il faut être très humble en télémédecine. Il faut savoir renvoyer vers le médecin traitant ou vers un spécialiste. Parfois, les patients ne sont pas contents qu’on les oriente, mais pour nous, c’est plutôt un gage de qualité de savoir le faire", explique Marion Lagneau, qui précise toutefois qu’"il y a la même peur de passer à côté de quelque chose en médecine présentielle qu’en télémédecine. Je n’ai pas l’impression que le risque soit plus grand."
Pour le paiement, les tarifs restent à définir et font actuellement l’objet de négociations. Pour MédecinDirect, ce sont les mutuelles qui prennent en charge la téléconsultation. Enfin, les modalités techniques à grande échelle restent à définir. Mais les médecins devront s’équiper.
Au final, "de façon étonnante, ça se passe presque comme une consultation normale, avec cette différence fondamentale que le patient n’est pas en face de vous", sourit Marion Lagneau. "Mais de toute façon, la médecine, c’est de l’humain avant tout. Et il y a cette humanité en télémédecine."