Pendant 29 ans, Thierry Beccaro a égayé les fins de matinée des téléspectateurs de France 2. C'est avec émotion que le présentateur de Motus vient d'annoncer son départ de France Télévisions. Mais c'est avec une émotion encore plus grande que l'animateur de 62 ans se confie sur son enfance, durement marquée par la maltraitance d'un père alcoolique.
"Une enfance maltraitée va forcément faire un adulte fragile"
La carrière de Thierry Beccaro est, selon l'intéressé, intimement liée à ce parcours personnel difficile. Chez Matthieu Belliard, jeudi sur Europe 1, il explique : "À Motus, pourquoi j'avais le sourire et pourquoi je l'aurai toujours ? C'est parce que tout le travail que j'ai effectué m'a permis de transformer cette douleur. Je me suis dit : 'je vais essayer de donner du sourire aux gens, de leur apporter de la bonne humeur'. Je m'aperçois qu'ils en ont tellement besoin."
Et pourtant, qu'il fut difficile pour Thierry Beccaro de réunir le courage suffisant pour s'exposer et entamer une carrière médiatique. "Une enfance maltraitée va forcément faire un adulte fragile, qui manque de confiance, qui a peur, qui doute, et qui n'aura pas forcément les mêmes atouts que quelqu'un à qui on a donné beaucoup d'amour et que l'on a encouragé quand il était jeune", assure-t-il. Dès lors, Thierry Beccaro va devoir se débrouiller avec "ce sac à dos" imaginaire, bourré de douleurs d'enfant. "Ce sac à dos, je l'ai trimbalé pendant toutes ces années, même quand j'ai commencé ma carrière à la radio. Et je le trimbale encore, même s'il est plus léger."
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"Je me suis dit que pour moi, pour ma famille, il fallait faire quelque chose"
Si le poids de ses souvenirs s'est peu à peu allégé, c'est parce que Thierry Beccaro a, pendant des années, suivi une thérapie avec un psychologue. "Heureusement, j'ai fait ce travail sur le divan pour évacuer tout ce que j'avais vécu, et pour arriver au pardon, pour me débarrasser de la rancœur, de l'amertume, de ce qui dévore", glisse l'animateur. "Je me suis dit que pour moi, pour ma famille, il fallait faire quelque chose. L'entourage ne sait pas forcément ce que vous avez vécu, car ce sont des choses qui ne sont pas racontables. C'est de l'indicible", explique-t-il, la voix tremblante. Et de poursuivre : "L'argent que j'ai investi dans ce travail, je ne l'ai pas mis ailleurs. Je l'ai mis pour essayer d'aller mieux, pour moi et pour tous ceux qui m'entourent, pour essayer d'avancer le mieux possible, arriver sur ce chemin de la résilience, et comprendre pourquoi mon père était devenu comme ça."
Thierry Beccaro confie avoir réussi "à pardonner". "Ça ne veut pas dire que j'oublie. Pardonner, ce n'est pas oublier. Mais c'est avancer."
Un livre écrit avec "la trouille au ventre"
Grâce à ce long travail psychologique et au soutien d'une amie, l'animateur de Motus a osé se lancer dans l'écriture d'un livre, Je suis né à 17 ans, paru chez Plon en février 2018, et récemment sorti en version de poche. "L'écriture de ce livre, ça a été difficile. J'ai eu une peur incroyable, car je n'avais jamais raconté quoi que ce soit de ma vie personnelle. Mais c'est une amie, ma première productrice, Monique Cara, qui m'a dit que je devrais raconter mon histoire, et que ça ferait du bien à beaucoup de gens. Je lui ai dit : 'Moi ? Je suis le mec le plus discret de l'audiovisuel français. Je n'ai jamais rien raconté et tu veux que je raconte ?'", se souvient-il sur notre antenne.
C'est donc avec "la trouille au ventre" que Thierry Beccaro s'est appliqué à coucher sur papier, noir sur blanc, ses souvenirs d'enfant battu. Surtout, il craignait que l'ouvrage, son histoire, soit mal perçu. "Un parcours comme le mien enferme, ce sont des vécus qui vous rétrécissent. Donc vous ne vous dites pas que votre histoire va aider les autres, parce qu'on pense qu'on est tout seul à l'avoir vécu", justifie-t-il. Et pourtant, aujourd'hui, quand Thierry Beccaro se rend dans des salons du livre et rencontre ses lecteurs, les réactions sont toutes plus émouvantes les unes que les autres. "Ces gens viennent me voir en me disant : 'Merci, j'ai vécu la même histoire que vous. Vous avez délivré la parole, vous avez ouvert une porte'. Ce n'est pas toujours le même malheur, mais c'est toujours la même douleur."
Thierry Beccaro n'est plus seul à porter son "sac à dos". Et en tant que nouvel ambassadeur de l'Unicef, il aide aujourd'hui les enfants battus à porter le leur.