C'est un rapport très attendu des victimes de pédocriminalité. La commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Église (Ciase) doit rendre publique mardi matin les résultats du rapport Sauvé. Plus de deux ans et demi de travail, de recherches et de témoignages ont été nécessaires pour évaluer le nombre de victimes de prêtres ou de religieux depuis les années 1950. Parmi ces victimes, estimées à 100.000 mineurs, Véronique, âgée de 60 ans aujourd'hui, a accepté de témoigner dans le cadre de ce rapport. Au micro d'Europe 1, elle confie qu'elle a été abusée par un prêtre, ami de sa famille, "à peu près pendant deux ans, entre [s]es 13 et 15 ans".
"C'est très douloureux parce qu'on a l'impression d'être abandonné"
Véronique raconte à quel point cela a été douloureux à supporter. "Le fait que ça ait duré plusieurs années, que c'était répétitif, plusieurs fois par semaine, ça abîme beaucoup. D'ailleurs, physiquement, je me suis un peu arrêtée de grandir à ce moment-là", affirme-t-elle, évoquant toute la difficulté à évoquer le sujet à l'époque. "J'ai essayé d'en parler finalement assez vite quand même, mais on ne m'a pas vraiment crue. C'est très douloureux parce qu'on a l'impression que non seulement on a été abusé, mais en plus, on est abandonné."
La victime souligne qu'elle a voulu oublier cette épreuve de sa vie, en vain. "Il y a eu toute une période pendant laquelle je n'en parlais plus. J'avais voulu enfouir ça pour vivre ma vie de famille, de mère. Puis, un beau jour, ça ressort parce que forcément, un jour, ça va ressortir", souffle-t-elle.
Un phénomène "d'une ampleur insoupçonnée"
Au-delà de sa souffrance personnelle, Véronique a décidé de témoigner en pensant à toutes les victimes abusées par des prêtres ou des religieux. "Il y a un silence qui, au fond, enferme les gens, les emprisonne, les enterre vivant dans un tombeau. Cette possibilité de parler et de briser le silence, voilà qui ouvre un peu la pierre du tombeau", explique-t-elle.
Au total, le rapport Sauvé comporte plus de 1.300 pages. Il est divisé en plusieurs parties, avec d'abord l'analyse de l'attitude de l'Église dans sa gestion de la pédocriminalité depuis les années 1950, puis un rapport historique et enfin une enquête sur le nombre total de Français victimes de pédocriminalité de la part de l'Église en France. "Le phénomène est d'une ampleur insoupçonnée", assure Philippe Portier, historien et membre de la commission