TOUR DE FRANCE - Vainqueur de la 2e étape à Spa, le Français s'empare du maillot jaune. Tous avaient déjà en tête l'étape de mardi, cette arrivée à Arenberg, au coeur de l'Enfer du Nord après 13,150 km de pavés régulièrement empruntés par les coureurs sur Paris-Roubaix dans le sens inverse. La Grande Boucle 2010 n'a pas attendu d'arriver en France pour vivre son premier grand tournant. Les monts de Liège-Bastogne-Liège auront animé prématurément la course dès ce lundi. Moins par devant, où seule une poignée de sept hommes aura pris la poudre d'escampette, que par derrière, dans un peloton qui revenait doucement sur les hommes de tête avant d'exploser, conséquence de chutes multiples dans la descente du col de Stockeu à une trentaine de kilomètres de Spa. Au soir de cette deuxième étape, la principale victime de cette chaussée glissante, qui a également piégé Lance Armstrong et Alberto Contador, sera peut-être Andy Schleck, le plus touché physiquement par cette chute, au point de contraindre son frère Fränk de rouler pour lui mais surtout son coéquipier, Fabian Cancellara, de sacrifier son maillot jaune pour attendre son leader. Les malheurs du Luxembourgeois, qui aura peut-être du mal à récupérer avant de se frotter dès demain aux pavés, faisaient le bonheur d'un homme, Sylvain Chavanel, dernier rescapé de cette échappée matinale, lancé dès lors vers la victoire, sa deuxième dans le Tour après son succès de Montluçon en 2008, mais aussi vers le maillot jaune abandonné par Cancellara. Écoutez Sylvain Chavanel (au micro de Loïs Ledu): Le microcosme du cyclisme commentera peut-être longtemps la décision du peloton de limiter les frais et de ramener un maximum de coureurs égarés en son sein sans même disputer le sprint avec l'accord tacite de la direction de course. Ces débats ne pourront priver le coureur de la Quick Step d'une immense émotion, celle d'un homme dont la carrière aurait pu s'arrêter le 25 avril, non loin de Spa, à deux kilomètres de l'arrivée de Liège-Bastogne-Liège. Victime d'une fracture du crâne, de dents cassées, d'une pommette enfoncée, après un terrible contact avec une voiture de directeur sportif, l'ancien protégé de Jean-René Bernaudeau est resté cloué au lit de longues semaines avant de signer un retour inespéré lors du Tour de Suisse (13-20 juin) puis de finir deuxième du championnat de France du contre-la-montre le week-end dernier. Les larmes aux yeux, Chavanel savourait cette revanche dans le grand bain de Spa. "C'est un moment inoubliable. Toutes mes victoires, je l'ai obtenues après avoir fait un grand numéro. Et aujourd'hui, j'ai fait un grand numéro. C'est le plus beau cadeau que je puisse faire pour l'équipe", réagissait-il à chaud. "C'est beaucoup d'émotions après beaucoup de galères. Mais la roue tourne dans le vélo. C'est le plus beau jour de ma vie dans le vélo." Un jour de gloire qui forçait l'admiration de son coéquipier et compagnon d'échappée, Jérôme Pineau, passé en tête de quatre des six côtes du jour (côte de France, côte de Fillot, côte de Werbomont et côte d'Aisomont) devant Taaramae (Cofidis) et Lloyd (Omega Pharma-Lotto) pour s'emparer du maillot à pois. Avec près de trois minutes d'avance désormais au classement général sur Fabian Cancellara, le rêve pourrait continuer longtemps pour Sylvain Chavanel, qui étrennera son maillot jaune sur les pavés du Nord. D'autres, comme Christian Vande Velde, le leader de la Garmin, et Damiano Cunego, l'ancien lauréat du Giro, qui ont perdu respectivement près de cinq et six minutes sur les leaders, maudiront peut-être cette étape jusqu'aux Champs-Elysées. Ainsi va le Tour qui ne se gagne pas mais se perd dès la première semaine... Voir aussi: Chavanel, itinéraire d'un surdoué