Vu du ciel, c'est un paysage de carte postale. Mais au niveau de la mer, cela ressemble à une décharge. A un an pile du début des Jeux olympiques de Rio, le 5 août 2016, la baie de Guanabara, où se dérouleront les épreuves de voile et de planche à voile, cristallisent les inquiétudes des sportifs et des organisateurs. "Le plus grand défi est le nettoyage de la baie", a d'ailleurs insisté le président du Comité international olympique (CIO), Thomas Bach. Et le défi est de taille. Une récente enquête de l'agence américaine Associated Press a ainsi révélé que les taux de pollution dans la baie de Guanabara étaient jusqu'à 1,7 million de fois supérieurs au seuil maximal toléré sur une plage de Californie ! Près de 100 tonnes de déchets se déversent chaque jour dans l'eau...
"Pneus, télés, sofas..." Pêcheur dans la baie, Nilo donne une idée des dégâts au micro d'Europe 1 : "On trouve des bouteilles en plastique, des pierres, des pneus, des télés, des sofas… Il y a de tout". Interrogé par l'AFP, Airton, responsable d'un "éco-navire", ces bennes à ordures flottantes déployées en dernier recours pour nettoyer ce qui peut l'être, ajoute : "J'y ai vu une porte de réfrigérateur, des mannequins en plastique, des lits entiers, des fenêtres, des chats et des chiens crevés, et même un cheval". Une bouche d'égout déverse à flot constant dans la baie une eau marron où flottent des excréments humains...
Même si le corridor des régates est situé à l'entrée de la baie, dans la partie la moins polluée, les athlètes qui sont venus reconnaître les lieux ne cachent pas leur inquiétude. "J'ai été malade ces deux dernières années", confie ainsi à Europe 1 Andy, qui entend représenter Hong Kong lors des prochains Jeux. "J'ai eu de la fièvre. Et je n'ai pas été bien pendant une semaine. Tous les sportifs sont inquiets parce que notre corps sera en contact direct avec l'eau. Donc s'ils peuvent nettoyer un peu, ce serait vraiment bien." Nettoyer. L'une des promesses de la candidature de Rio était de traiter à 80% les eaux usées qui se jettent dans la baie. Mais ce chiffre semble désormais illusoire, alors que deux milliards de dollars (1,84 milliard d'euros) ont déjà été investis ces vingt dernières années pour la dépollution de la baie de Guanbara.
"Nous avons analysé la façon dont les détritus se déplacent." "En 2009, quand nous avons remporté les JO, à peine 13% des eaux usées étaient traitées. Aujourd'hui nous sommes à 50%, et nous arriverons à 80% en 2016", assure le vice-président de Rio 2016, Leonardo Gryner. Conscient du problème, le comité d'organisation précise que tout a été fait en amont pour éviter les soucis lors des épreuves. La santé des athlètes en est un, le bon déroulement des compétitions en est un autre. Un contact avec un élément flottant, ne serait-ce qu'un sac plastique, peut remettre en cause une régate. "Nous avons cartographié les courants autour de la baie et la façon dont les détritus se déplacent", insiste Mario Andrada, directeur de Communication de Rio 2016.
"Dans un an, nous aurons, je pense, une compétition formidable." Conscient du travail qui attend encore les "éco-navires", le président du CIO s'est néanmoins voulu confiant, mercredi. Il a cité le triathlon qui a eu lieu le week-end dernier à Rio et qui a vu des nageurs se lancer depuis la plage de Copacabana. Cette répétition générale a servi selon lui à prouver que tout allait "dans la bonne direction". "Tout doit être étroitement contrôlé", a néanmoins ajouté Thomas Bach. "Dans un an, nous aurons, je pense, une compétition formidable."
Malgré ces déclarations d'intention, les compétiteurs, dont certains ont demandé la délocalisation des épreuves, ne semblent pas rassurés. Certains scientifiques leur conseillent même de se vacciner contre l'hépatite B avant de rejoindre Rio. Dans les conclusions qu'il a tirées de ses visites sur le site, l'athlète australien Andrew Lechte, venu en éclaireur pour son équipe, a d'ores et déjà prévenu les futurs médaillés d'or : il leur déconseille fortement de fêter leur victoire en plongeant dans l'eau, comme c'est la coutume...