L'Empire contre-attaque. A la fin des années 1990 et au début des années 2000, pas grand monde ne pariait sur l'équipe d'Allemagne. Il faut dire que les Allemands sont brutalement sortis par la Croatie en quart de finale du Mondial 1998. Puis à l'Euro 2000, la Nationalmannschaft est éliminée dès le premier tour avec deux défaites et un match nul. Pour l'Allemagne, l'heure est grave. Les dirigeants de la fédération allemande de football vont alors réformer en profondeur tout un système. Des changements radicaux qui ont abouti dimanche soir, avec le quatrième titre de champion du monde de l'histoire de la sélection nationale, obtenu face à l'Argentine (1-0 a.p.). Europe1.fr vous raconte comment l'Allemagne s'est retroussée les manches pour retrouver les sommets.
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La défaite de l'Allemagne face à la Croatie en quart de finale du Mondial 1998 :
La prise de conscience. Revenons 16 ans en arrière, en 1998. Pendant que la France remporte son premier titre de champion du monde, l'Allemagne s'interroge. Contacté par Europe 1, Gernot Rohr, l'ancien entraîneur de Zidane et Lizarazu à Bordeaux en 1996, se rappelle : "J'étais invité par la fédération allemande pour parler de la formation française, ils voulaient savoir pourquoi ça fonctionnait en France." Les dirigeants du ballon-rond outre-Rhin s'inspirent alors des modèles français, mais également néerlandais. La débâcle de l'Euro 2000 les incite à accélérer le changement. Gernot Rohr témoigne : "La fédération a imposé aux clubs d'ouvrir des centres de formation pour tous les clubs de première division". Dès la saison 2001-2002, toutes les équipes de Bundesliga se dotent alors de ces structures. Dans ces centres de formation, tout le travail effectué auprès des jeunes est également repensé.
La révolution technique. A la fin des années 1990, l'Allemagne est encore une équipe basée avant tout sur la puissance physique. "Nous sommes alors passés de critères anciens à des critères modernes. C'était fini le temps où on misait tout sur le physique. A partir des années 2000, les clubs ont ouvert leurs portes aux joueurs techniques, vifs, rapides, avec du jeu à une touche de balle", constate Gernot Rohr. Quelques années plus tard, le travail porte ses fruits. Les centres de formation produisent alors une quantité impressionnante de joueurs de haut niveau. Techniquement, l'Allemagne surpasse aujourd'hui largement la France ou les Pays-Bas, ses anciens modèles. Vous en doutez ? Mario Götze, Toni Kroos, Mesut Özil, André Schurrle ou encore Thomas Müller, tous âgés de moins de 25 ans, sont d'excellents manieurs de ballons. Surtout, les jeunes Allemands sont titulaires dans les plus grands clubs au monde, à commencer par le Bayern Munich. Leur point commun : ils ont tous été formés dans les années 2000.
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La révolution tactique. Le match qui fera définitivement basculer le football allemand dans une autre époque est…une défaite. En 2004, l'Allemagne est sortie une deuxième fois de suite au premier tour de l'Euro, éliminée par la République Tchèque (1-2). Tactiquement, le football allemand se fait alors vieillot. "Après cet Euro, on a abandonné le système avec deux stoppeurs et le marquage individuel, à la culotte", se souvient Gernot Rohr. L'actuel sélectionneur du Niger poursuit : "Le vrai progrès a été le passage du marquage individuel à la défense en zone, comme dans presque toutes les grandes nations du foot." Cette révolution tactique, initiée par le sélectionneur Jürgen Klinsmann entre 2004 et 2006, ne sera plus jamais remise en question. Et pour cause : dès 2006, l'Allemagne atteint les demi-finales du Mondial, organisé sur son sol. La Nationalmannschaft ne quittera plus jamais le dernier carré d'une compétition internationale.
La victoire de l'Allemagne en quart de finale de la Coupe du monde 2006, face à...l'Argentine (1-1, 4 t.a.b à 2) :
Conserver l'esprit allemand. A partir de 2006, la sélection nationale séduit tous les amoureux du foot mais échoue désespérément dans le dernier carré du Mondial et de l'Euro. Le sélectionneur Joachim Löw est alors très critiqué pour l'absence de titre. Gernot Rohr confirme : "Il y avait une énorme pression en Allemagne, tout le monde voulait cette coupe du monde". Pour être sacré championne du monde, la Nationalmannschaft a continué à bien jouer, mais n'a pas renié les valeurs historiques du foot allemand qui ont donné tant de succès. "Il y a eu un retour de la rigueur défensive. L'équipe d'aujourd'hui est un très bon dosage du foot allemand nouveau, avec le beau jeu, mais aussi ses anciennes recettes : le pragmatisme et le réalisme", explique Gernot Rohr. Avec le succès en Coupe du monde dimanche soir, les Allemands n'espèrent qu'une chose : continuer à gagner, encore et encore. Comme l'Allemagne l'a toujours fait.